Nolan brosse avec brio, et sans démentir un goût inaltéré pour la narration décalée, cet affrontement entre deux magiciens unis par la même passion pour leur art mais opposés par une rivalité venimeuse. Opposition qui se double d’une conception différente de la magie : tandis que l’un est modeste, créatif, sans le sou, mais élève celle-ci au rang de discipline de vie, au point de façonner toute son existence aux besoins de son art, l’autre est méthodique, illustre mais dépourvu d’imaginaire, tributaire de l’inventivité de son mentor pour asseoir les conditions de son succès. Cet antagonisme basé sur l’éternel conflit pour gagner le droit au haut de l’affiche exacerbe les passions des deux hommes, les érige en artificiers d’un combat haineux où il ne sera d’issue que dans l’anéantissement complet de l’autre. La haine ascendante est illustrée à contre-courant par le biais d’une mise en scène audacieuse. La maîtrise de Nolan dans cet art difficile, donne une nouvelle fois à l’élaboration de son récit une charpente faite de va-et-vient continuels entre un passé et un présent qu’il devient quelquefois malaisé de nuancer. L’histoire prend la semblance d’une architecture entrecroisée et alternée qui, si l’on n’est pas coutumier du fait chez son auteur, peut désorienter un moment. Il y a lieu aussi de souligner la qualité des décors, qui apportent leur contribution indispensable à la véracité du récit, ainsi que le rendu impeccable du jeu d’acteurs, Michael Caine en tête de distribution, qui excelle dans ces rôles de vieux sages prolixes en conseils avisés. Hugh Jackman et Christian Bale campent chacun un personnage de magicien tourmenté, fourvoyé par un même illusion de puissance, déclinant de façon différente la disposition au sacrifice qu’exige de lui le dévouement absolu à son art. Couplée à l’ambition absolue de surpasser l’autre dans ses propres succès, cette distorsion les pousse dans des mesures différentes à se dénaturer, illustrant par là-même une fable aux relents finalement assez contemporains que pour servir de miroir à bien des rivalités modernes. A l'arrivée, donc, un film réussi, sans fioritures excessives, et qui parvient à tenir les promesses qu’il engage d’entrée de jeu, à l’instar du final d’un tour de magie prodigieux opéré avec panache.

J'ai adoré ce film. On est tenu en haleine jusqu'au bout. Du tout grand spectacle. Un seul conseil : aller le voir

Etrange et surprenant... Quelques scènes parfois difficiles. A voir !

Ce film confirme tout le bien que je pense du cinéma de Christopher Nolan : riche, varié, surprenant et intelligent. Au lieu de décrire le monde de la magie facile et classique à la David Copperfield, le papa de Memento signe ici une histoire de rivalité entre deux grands magiciens, rivalité placée sous le signe du secret, mais montre aussi à quel point la soif d'ambition et de reconnaissance peut virer à l'obsession et là, tous les coups sont permis. Racontée sous forme de flashbacks, l'histoire du Prestige est narrée à merveille grâce à un scénario en béton, une mise en scène brillante et des acteurs au sommet de leur forme. Malheureusement, quelques longueurs et les apparitions trop brèves de David Bowie m'empêchent de considérer The Prestige comme le nouveau chef-d'oeuvre de son auteur, mais il reste tout de même un excellent long-métrage.

Christopher Nolan nous avait bluffé l’année passée avec son « Batman begins ». Par une mise en scène inspirée et audacieuse, insufflant une nouvelle vie à ce sombre héros. Il nous revient cette année avec « Le prestige » dont il faut reconnaître une puissance moindre. Le pitch est pourtant des plus passionnants : la rivalité de deux magiciens ennemis dont le noir dessein est de faire trébucher l’autre, quelque soit les moyens utilisés, pour lui prendre sa place. Pour l’illustrer, le scénario repose sur la lecture à tour de rôle du journal intime de chacun d’eux, entrecroisant les histoires par bribes. Cette structuration du film, soulignée par la voix off se révèle un peu lourde et trop loquace. L’action et la magie n’apparaissant alors qu’en second plan le plus souvent. Plus grave encore l’intrigue s’étiole très vite le clou du spectacle, le fameux prestige pour le film, a des allures de pétard mouillé et ne reste qu'une promesse. Le charisme et le talent de Christian Bale, la présence de Michael Caine et de David Bowie viennent toutefois compenser la pesante ambiance de ce film sympathique mais vite oubliable.