saraboul
Léon-Ferdinand
- Membre depuis le 11/03/2009
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Publié le 11 mars 2009
Article paru sur FACEBOOK:
Ces dernières années, Hollywood nous a offert bien peu de films avec des prêtres, religieux ou religieuses comme héros principaux. Tout le monde se souviendra sans doute de la prestation de Susan Sarandon dans le poignant rôle de Sr Helen Prejean dans Dead Man Walking (1995), rôle pour lequel elle obtint l’oscar de la meilleure actrice. A noter aussi Robert de Niro dans un rôle de prêtre de quartier dans Sleepers (1996) ou Alfred Molina, le méchant évêque du Da Vinci Code (2006). Il est vrai qu’il y eut de nombreuses comédies plus ou moins déjantées sur le thème de la religion (Sister Act 1 et 2 : 1992-1993 ; The Dangerous lives of Altar Boys : 2002, Keeping the faith : 2000), mais il n’empêche qu’on a l’impression qu’Hollywood boude les hommes et femmes de religion. Pourtant, il n’en a pas toujours été le cas. Vers la fin de la Seconde Guerre Mondiale, sur une vingtaine d’années, les studios hollywoodiens ont enchaîné un nombre impressionnant de films avec des prêtres, religieux et religieuses dont plusieurs ont rapporté des oscars. En 1944, le film musical Going My Way de Leo McCarey ouvre la voie. C’est le crooner Bing Crosby qui joue le rôle du père O’Malley. Ce film remportera pas moins de 7 oscars. L’année suivante, Leo McCarey récidive avec The Bells of Saint-Mary : Bing Crosby est rejoint par la belle Ingrid Bergman et le duo rapporte au film 8 nominations aux oscars. C’est le début d’une période faste durant laquelle de grands acteurs vont revêtir l’habit religieux dans l’espérance d’être récompensé aux oscars. Quelques exemples : Black Narcissus (1947) avec Deborah Kerr (2 oscars) ; The Nun’s Story (1959) avec Audrey Hepburn (8 nominations aux oscars) ; The Cardinal (1963) avec Tom Tryon (6 nominations aux oscars) ; The Sound of the Music (1965) avec Julie Andrews (5 oscars) ; The Shoes of the Fisherman (1968) avec Anthony Quinn (2 nominations aux oscars). Il faut bien entendu mettre ce phénomène en parallèle avec l’intérêt hollywoodien pour les drames bibliques qui seront nombreux à être récompensés durant les années 1950 (Ten Commandements : 1956, Quo Vadis : 1951, Ben Hur : 1959, etc).
A partir des années 1970 les films avec prêtres, religieux et religieuses vont tomber en désuétude à l’exception de quelques films d’épouvante (The Exorcist : 1973) et des drames historiques qui ne sont pas américains (Le nom de la Rose : 1986 ; The Mission : 1986). Le film récent de John Patrick Shanley, Doubt (2008), ne signe peut-être pas le retour en force du genre mais il n’en pas moins intéressant de noter ce nouvel intérêt de Hollywood pour la figure du religieux. L’intrigue de Doubt est intéressante à bien des points de vue et dénote du changement radical dans la conception que la société se fait des célibataires consacrés.
L’histoire de Doubt se déroule en 1964, à l'école catholique de Saint-Nicolas, dans le Bronx, où New York Soeur Aloysius Beauvier (brillament jouée par Meryl Streep), directrice de l'école, dirige en main de maître l'établissement. Elle croit dur comme fer à l'ordre, la rigueur et à l'intimidation, dans une époque troublée. Tout l'opposé du père Brendan Flynn (Philip Seymour Hoffmann), prêtre de la paroisse et entraîneur de l'équipe de basketball, qui sent que le vent a tourné et que les mentalités ont évolué. Mais un jour, la jeune professeur d'histoire, sœur James (Amy Adams), apprend à sœur Aloysius que Flynn nourrit une relation très proche avec Donald Miller, jeune garçon afro-américain de 12 ans qui est le premier élève noir à entrer à Saint-Nicolas. La directrice y voit le pire, soupçonnant l'aumônier de pédophilie, et en profite pour assouvir sa soif d’autorité et de démasquer Flynn, estimant que ses soupçons sont fondés... On l’a bien compris, l’intrigue Doubt surfe sur les scandales récents de pédophilie qui ont frappé l’Eglise américaine.
Si les soupçons qui pèsent sur le Père Flynn ne sont prouvés à aucun moment du film, il n’en reste pas moins que le téléspectateur a toutes les raisons de douter de ses bonnes intentions. En plus des soupçons, le film présente avec finesse les difficiles relations entre hommes et femmes de Dieu. En effet, pour Sr Aloysius, le Père Flynn est avant tout un adversaire. Elle accepte difficilement la manière dont les prêtres font peser leur autorité sur elle. Elle avoue certes avoir eu de bonne relations avec certains d’entre eux mais accepte mal la désinvolture et l’autoritarisme de la jeune génération représentée par Flynn. En résumé, Doubt nous laisse avec ce double message : d’une part, que les hommes et femmes de Dieu ne sont pas au-dessus de tout soupçon (les scandales récents prouvent qu’on ne peut entièrement leur faire confiance) et, d’autre part, qu’il conviendrait que l’Eglise Catholique s’interroge sérieusement sur les rôles complémentaires des hommes et des femmes dans la gestion de l’Eglise.
Je voudrais maintenant comparer Doubt avec un des films dont il était question plus haut, The Bells of Saint-Mary . En fait, à y regarder de près, les deux histoires présentent de nombreuses similitudes. Il s’agit de l’histoire d’un jeune prêtre aux idées progressistes, le Père O’Malley (Bing Crosby), qui est nommé responsable d’une école dirigée par la très stricte Sr Mary Benedict (Ingrid Bergman). Ces deux fortes personnalités ont des idées radicalement opposées sur la pédagogie mais s’affrontent dans un climat bon enfant. De pédophilie il n’en est nullement question ; les prêtres et les religieuses sont adulés par les enfants et les parents qui leur font une confiance sans limite. Voyez à quel point il est intéressant de comparer Doub t et The Bells of Saint-Mary : on constate facilement à quel point les esprits ont changé en 60 ans. Alors qu’à la fin de la Seconde Guerre Mondiale les prêtres, religieux et religieuses étaient vus comme les remparts moraux sur qui les gens pouvaient compter, aujourd’hui la mode est de douter de ces représentants de Dieu.
Cela étant dit, la figure du religieux n’a pas dit son dernier mot Le dernier film de Clint Eastwood, Gran Torino (2008), en est un bel exemple. Il est difficile de ne pas sympathiser avec le jeune prêtre (« puceau de 27 ans suréduqué ») qui, avec une générosité non feinte, ne demande qu’a aider le personnage principal (joué par Clint Eastwood). Récemment encore, dans le 15ème épisode de la 5ème saison de la série Dr House , il était question d’un prêtre qui, en raison d’une fausse accusation de pédophilie et des conséquences qui s’en sont suivies, a perdu la foi : l’épisode est un bel exemple de questionnement existentiel. Parmi les films à venir, il y a le très attendu Angels and Demons de Ron Howard, adapté d’un livre de Dan Brown (Da Vinci Code ), film qui suscitera à n’en point douter des critiques négatives de la part de l’institution ecclésiale. Enfin, l’un des prochains films de Martin Scorcese, Silence , concernera la difficile évangélisation du Japon au 17ème siècle. A n’en point douter, les prêtres, religieux et religieuses gardent une place de choix dans le 7ème art : il semble, malgré la diminution des vocations et les profondes mutations de nos sociétés, que les réalisateurs de cinéma auront toujours besoin de ces figures hors du commun pour raconter des histoires tout aussi hors du commun.
Publié le 25 avril 2006
Shooting dogs est un film intéressant. Etant moi même rwandais, j'ai pu constater que Michael Caton-Jones a su mettre par image la tragédie que mon pays a traversé. Par rapport à Hotel Rwanda, Shooting dogs est beaucoup plus recherché et rend mieux compte des sensibilités rwandaises. En effet, les acteurs de Hotel Rwanda étaient tous des étrangers, ce qui faisait que les rwandais pouvaient avoir du mal à se reconnaître dans leur jeu. Même si shooting dogs contient un certains nombre d'anachronismes, le film est joué par des rwandais, a été filmé au Rwanda, ce qui contribue à le rendre plus réaliste. Je me demande si Michael Caton-Jones est chrétien, car j'avoue que je ne m'attendais pas à ce que la question de la foi soit à ce point abordée. L'Eglise Catholique a été tellement critiquée après le génocide, qu'il me semblait impossible qu'un film sur le génocide rwandais lui fasse une aussi belle part. Je n'ai pas vécu la situation du film, mais je pense qu'il est judicieux de montrer que certains prêtres se sont conduits de manière héroïque. Le gros problème du film est qu'il diabolise de manière systématique les hutus. S'il est vrai de ne pas cacher que ce sont des extrêmistes hutus qui ont fomentés et mis en oeuvre le génocide, Shooting dogs exagère un peu en ne montrant que des hutus extrêmistes et aucun qui aurait pu refuser cette logique de la violence. Il est vrai que le ministre Ngulinzira est montré et qu'il rappelle aux soldats de l'ONU la Shoah, mais je doute que le télespectateur non averti a deviné que c'était un hutu modéré, qui a été lui même victime du génocide. Voilà!! En gros c'est un bon film, mais je pense que pour un sujet aussi délicat, il ne faudrait pas être aussi manichéen.
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