Sans aller jusqu'à crier au chef-d'oeuvre, le moins qu'on puisse dire de The Artist est qu'il constitue - à l'époque où la surenchère d'effets spéciaux et de 3D parvient à faire passer des daubes comme la nouvelle version des Trois Mousquetaires pour des films potables - un ofni (objet filmé non identifiable) dans le paysage cinématographique de cette fin d'année. Tout à la fois hommage et pastiche, chronique sociale et comédie douce-amère, le film pêche un peu par son scénario très (trop?) simple et quelques longueurs (surtout vers la fin) mais n'en reste pas moins un divertissement de haut niveau. Avec Jean Dujardin au mieux de sa forme (bon, j'avoue je suis une fan depuis l'époque d'Un gars, Une fille), Bérénice Bejo dans un rôle d'ingénue qui lui sied à merveille, et des seconds rôles savoureux (je pense notamment et surtout à John Goodman), The Artist est aussi le pari fou mais réussi d'un réalisateur qui n'a pas eu peur d'aller à contre-courant de la débauche actuelle d'action, de violence et de vulgarité. Un excellent moment à passer donc et un très très bon film.

Si l'idée de départ peut paraître icônoclaste et, partant, si l'on peut espérer un film jouissif, le résultat n'est hélas pas à la hauteur de l'attente comme si le réalisateur avait, tout comme son personnage principal, été dépassé par la tâche qui l'attendait. Le film est donc un peu lisse et passe presque pour un pub pour le Vatican (un comble). Il y a bien sûr quelques bons moments et un début de réflexion sur le gouffre entre la religion telle que vécue à l'intérieur de murs et celle de la rue et une excellente interprétation de Michel Piccoli. Mais, au final, c'est un peu léger dans la balance.

Franchement, il faut être difficile ou partir avec un a priori négatif pour ne pas apprécier ce dernier film. Bien sûr, comme pour tous les précédents, tous les éléments du livre ne s'y retrouvent pas (ce serait d'ailleurs une gageure) mais c'est l'essence de l'histoire qui a été captée et là, on ne peut que tirer son chapeau, non seulement pour ce film ci mais pour tous ceux qui l'ont précédé et qui forment au bout de dix ans, une saga parmi les meilleures que le cinéma nous ait offertes. J'ai particulièrement aimé le jeu des acteurs qui s'est amélioré au fil des épisodes pour trouver ici une profondeur bien rare chez les jeunes vedettes de cet âge. Alors oui, le final est un peu ridicule (mais il l'est déjà dans le livre), oui certains moments sont un peu longuets, mais bon, faites aussi fonctionner un peu votre imagination. Il y a d'un côté les livres qui sont, toutes proportions gardées, des chefs-d'oeuvre de la littérature fantasy du 20ème siècle et de l'autre les films qui ont créé un univers un tantinet différent mais qui existent bel et bien par ou pour eux-mêmes. Vous en connaissez beaucoup d'oeuvres littéraires dont on peut dire de même?