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À perdre la raison très bien accueilli à Cannes
Publié le 23 mai 2012 dans Actu ciné
Il ne déclenche pas de polémique et reçoit des critiques très positives du monde entier
Des applaudissements soutenus. Lors d’une projection de presse, ce n’est pas si courant. À perdre la raison, le film de Joachim Lafosse librement inspiré du quintuple infanticide de Nivelles, a été accueilli chaleureusement hier au Festival de Cannes. Loin des polémiques suscitées en Belgique, le drame emmené par une sublime Émilie Dequenne a secoué le cœur et la tête des journalistes et festivaliers du monde entier.
“L’affaire Lhermitte ? Connais pas”, nous confie à la sortie de la projection un confrère brésilien touché par “la sobriété de l’histoire” tandis que d’autres journalistes critiquent l’image trop passive et négative du père nord-africain.
“Moi, j’en avais entendu parler”, ajoute une Britannique. “Je suis venue le voir à cause du scandale suscité chez vous. Mais je ne le comprends pas bien : je n’ai pas l’impression que le film porte de jugement moral.”
De fait, la force d’À perdre la raison réside dans son équilibre. Même si les proches du Dr Schaar risquent de s’étrangler en découvrant le généraliste organiser des mariages blancs, cette fiction (car c’en est bien une, et non un documentaire) décrit les protagonistes sans manichéisme, tout en créant un malaise : chacun est enfermé dans sa logique et accepte dès le départ des compromis qui vont le piéger. Quand le Dr Pinget demande à Murielle : “Mais qu’est-ce qu’on a fait de mal ?”, la question tourne longtemps en tête.
Objectivement, même si certaines réflexions paraissent assassines, il a toujours offert à Mounir et Murielle son temps et son argent. Elle a aussi donné beaucoup en retour. Sacrifiant sa vie familiale et affective sur l’autel du confort.
Face à la dépression, elle se sent seule. Trop seule. À qui la faute ? Joachim Lafosse ne se prononce pas.
Preuve de la subtilité du tableau : à la sortie de la salle, les discussions allaient bon train, et personne n’était d’accord sur le nom du personnage le plus lourdement responsable du drame. “Je suis vraiment soulagé, lâche Joachim Lafosse après la vision. Cette histoire m’a bouleversé et le public a aimé. Les gens me disent que cela les fait réfléchir, que c’est subtil. C’est le plus important. Les spectateurs sont intelligents, ils peuvent se faire leur propre opinion. Certains trouvent qu’un infanticide leur paraît moins impensable ou incompréhensible dans ces conditions. C’était primordial. Il n’y a pas la moindre polémique : à Cannes, on parle de cinéma et chacun sait que ce n’est pas la réalité.” Ce qui ne l’a pas empêché de stresser au moment de monter sur scène, hier à 22 h 15. “J’ai senti les bouffées d’émotion monter toute l’après-midi. Mais c’est formidable.”
Patrick Laurent
“L’affaire Lhermitte ? Connais pas”, nous confie à la sortie de la projection un confrère brésilien touché par “la sobriété de l’histoire” tandis que d’autres journalistes critiquent l’image trop passive et négative du père nord-africain.
“Moi, j’en avais entendu parler”, ajoute une Britannique. “Je suis venue le voir à cause du scandale suscité chez vous. Mais je ne le comprends pas bien : je n’ai pas l’impression que le film porte de jugement moral.”
De fait, la force d’À perdre la raison réside dans son équilibre. Même si les proches du Dr Schaar risquent de s’étrangler en découvrant le généraliste organiser des mariages blancs, cette fiction (car c’en est bien une, et non un documentaire) décrit les protagonistes sans manichéisme, tout en créant un malaise : chacun est enfermé dans sa logique et accepte dès le départ des compromis qui vont le piéger. Quand le Dr Pinget demande à Murielle : “Mais qu’est-ce qu’on a fait de mal ?”, la question tourne longtemps en tête.
Objectivement, même si certaines réflexions paraissent assassines, il a toujours offert à Mounir et Murielle son temps et son argent. Elle a aussi donné beaucoup en retour. Sacrifiant sa vie familiale et affective sur l’autel du confort.
Face à la dépression, elle se sent seule. Trop seule. À qui la faute ? Joachim Lafosse ne se prononce pas.
Preuve de la subtilité du tableau : à la sortie de la salle, les discussions allaient bon train, et personne n’était d’accord sur le nom du personnage le plus lourdement responsable du drame. “Je suis vraiment soulagé, lâche Joachim Lafosse après la vision. Cette histoire m’a bouleversé et le public a aimé. Les gens me disent que cela les fait réfléchir, que c’est subtil. C’est le plus important. Les spectateurs sont intelligents, ils peuvent se faire leur propre opinion. Certains trouvent qu’un infanticide leur paraît moins impensable ou incompréhensible dans ces conditions. C’était primordial. Il n’y a pas la moindre polémique : à Cannes, on parle de cinéma et chacun sait que ce n’est pas la réalité.” Ce qui ne l’a pas empêché de stresser au moment de monter sur scène, hier à 22 h 15. “J’ai senti les bouffées d’émotion monter toute l’après-midi. Mais c’est formidable.”
Patrick Laurent