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C’est arrivé (presque) près de chez vous
Publié le 12 mai 2011 dans Actu ciné
Il y a tout juste vingt ans, Jaco Van Dormael décrochait à Cannes la Caméra d’or, avec “Toto le Héros”. Cette année, la magie cannoise se poursuit pour les Belges. Avec “La Fée”, du trio Abel-Gordon-Romy, dès ce soir.
Avec cinq longs métrages majoritaires, deux coproductions et
quatre courts métrages sélectionnés
à Cannes, le cinéma belge peut encore
s’autocongratuler - avec en ligne de mire une potentielle
troisième Palme d’or pour Jean-Pierre et Luc
Dardenne, qui en ferait les réalisateurs les plus
primés du Festival. Les Dardenne arrivent avec "Le Gamin au
Vélo" en compétition tandis que Bouli Lanners,
avec "Les Géants", et le trio Abel-Gordon-Romy, avec "La
Fée", sont à la Quinzaine des
Réalisateurs, renforcés d’un jeune
confrère flamand, Gust Van den Berghe (avec
"L’Oiseau bleu"), de nouveaux venus
(Jérôme le Maire et Vincent Solheid avec "Le
Grand’Tour", Valéry Rosier avec le court
métrage "Dimanches", Wannes Destoop avec "Badpakje 46" ou
Pieter Dirkx avec "Bento Monogatari") et de coproductions (dont
"L’exercice d’Etat" de Pierre Schoeller, avec
Olivier Gourmet). Inévitablement, le secrétaire
général de la Communauté
française de Belgique, Frédéric
Delcor, et la ministre de la Culture et de l’Audiovisuel,
Fadila Laanan, se sont réjouis de cette "nouvelle
année exceptionnelle pour le cinéma belge". Mais
ils soulignent aussi que cette présence
régulière à Cannes ne doit pas
être "banalisée" et reste une "performance".
Performance qui est le fruit de vingt ans de travail de fond. On ne
remontera pas jusqu’aux pionniers, ni même
jusqu’à André Delvaux, même
si, au dire de Jaco Van Dormael, ce dernier a ouvert "la porte du
cinéma belge dans laquelle nous nous sommes
engouffrés". En 1988, Delvaux était en
compétition à Cannes avec
"L’œuvre au noir". C’était
alors, selon le bilan annuel du Centre du Cinéma de la
Communauté française, "un honneur rare". Trois
ans plus tard, "Toto le Héros" décrochait la
Caméra d’or (récompensant le meilleur
premier long métrage), le prix du Jury International des
Jeunes et le prix du Public - avant de remporter le César du
Meilleur film étranger. "Quand on a vu que Jaco revenait
avec un prix, quelque chose s’est
débloqué", se souvient Patrick Quinet, alors
étudiant à l’Insas et futur
président de l’Union des producteurs de films
francophones. "On s’est dit : c’est possible, il
suffit d’oser."
Ce fut le début de l’émulation : dès 1992, un trio d’étudiants de l’Insas "provoque une émeute à Cannes" (selon les termes de l’Agence France Presse) avec "C’est arrivé près de chez vous", ovni décoiffant retenu à la Semaine de la Critique. Rémy Belvaux, André Bonzel, Benoît Poelvoorde l’ont concocté "entre amis". Sachant officieusement dès décembre qu’ils seraient à Cannes, ils obtiennent une avance exceptionnelle de la Commission de sélection des films de la Communauté française pour terminer le film dans les délais.
Car la présence belge à Cannes est aussi le fruit de la longue relation entre professionnels et organismes subsidiants - fût-elle parfois tendue et compliquée. Lors du point presse vendredi dernier, Luc Dardenne a ainsi rendu hommage au rôle de la Commission de sélection des films du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Communauté française : "Parce qu’elle est la seule qui fonde ses décisions sur des critères qualitatifs et esthétiques, elle est la plus importante pour mon frère et moi." Sans doute le réalisateur songeait-il aussi au regretté Henri Ingberg, secrétaire général de la Communauté française jusqu’à son décès en 2007, soutien indéfectible des frères après l’échec de leurs premiers films ("Falsch" et "Je pense à vous"). "Henri, c’était parfois un personnage compliqué, mais avec lui, on voyait ce qu’était une politique culturelle", nous confia en 2008 un pilier de son administration.
Depuis le début des années 2000, la Commission de sélection des films, dotée d’un budget de 9,8 millions d’euros, a vu son action renforcée par Wallimage, le fonds régional wallon d’investissement audiovisuel, qui fêtera à Cannes ses dix ans, ses 136 productions soutenues et les quelque 107 millions d’euros de dépenses générées en Wallonie (pour 33 millions investis). Depuis deux ans, Bruxellimage est actif sur le même modèle au sein de la région capitale. Entre-temps, la création du tax shelter, en 2003, grâce au lobbying de longue date du sénateur MR Philippe Monfils et à l’investissement de Patrock Quinet, président de l’Union des producteurs de films francophones, a démultiplié les moyens financiers du cinéma belge (lire en page 26). Cet incitant fiscal, destiné à amener des entreprises à investir dans la productio nune partie de leurs bénéfices en contrepartie d’une réduction d’impôts, a injecté quelque 300 millions d’euros en huit ans. L’articulation de ces différentes ressources, auxquelles il faut ajouter les coproductions avec le Vlaams Audiovisueel Fonds (VAF), forme un système "qui permet à la création de s’exprimer", estime Frédéric Delcor - même si certains souhaitent qu’on simplifie le parcours du combattant que représente la tournée de ces différents "guichets".
... la suite sur lalibre.be
Alain Lorfèvre
Ce fut le début de l’émulation : dès 1992, un trio d’étudiants de l’Insas "provoque une émeute à Cannes" (selon les termes de l’Agence France Presse) avec "C’est arrivé près de chez vous", ovni décoiffant retenu à la Semaine de la Critique. Rémy Belvaux, André Bonzel, Benoît Poelvoorde l’ont concocté "entre amis". Sachant officieusement dès décembre qu’ils seraient à Cannes, ils obtiennent une avance exceptionnelle de la Commission de sélection des films de la Communauté française pour terminer le film dans les délais.
Car la présence belge à Cannes est aussi le fruit de la longue relation entre professionnels et organismes subsidiants - fût-elle parfois tendue et compliquée. Lors du point presse vendredi dernier, Luc Dardenne a ainsi rendu hommage au rôle de la Commission de sélection des films du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Communauté française : "Parce qu’elle est la seule qui fonde ses décisions sur des critères qualitatifs et esthétiques, elle est la plus importante pour mon frère et moi." Sans doute le réalisateur songeait-il aussi au regretté Henri Ingberg, secrétaire général de la Communauté française jusqu’à son décès en 2007, soutien indéfectible des frères après l’échec de leurs premiers films ("Falsch" et "Je pense à vous"). "Henri, c’était parfois un personnage compliqué, mais avec lui, on voyait ce qu’était une politique culturelle", nous confia en 2008 un pilier de son administration.
Depuis le début des années 2000, la Commission de sélection des films, dotée d’un budget de 9,8 millions d’euros, a vu son action renforcée par Wallimage, le fonds régional wallon d’investissement audiovisuel, qui fêtera à Cannes ses dix ans, ses 136 productions soutenues et les quelque 107 millions d’euros de dépenses générées en Wallonie (pour 33 millions investis). Depuis deux ans, Bruxellimage est actif sur le même modèle au sein de la région capitale. Entre-temps, la création du tax shelter, en 2003, grâce au lobbying de longue date du sénateur MR Philippe Monfils et à l’investissement de Patrock Quinet, président de l’Union des producteurs de films francophones, a démultiplié les moyens financiers du cinéma belge (lire en page 26). Cet incitant fiscal, destiné à amener des entreprises à investir dans la productio nune partie de leurs bénéfices en contrepartie d’une réduction d’impôts, a injecté quelque 300 millions d’euros en huit ans. L’articulation de ces différentes ressources, auxquelles il faut ajouter les coproductions avec le Vlaams Audiovisueel Fonds (VAF), forme un système "qui permet à la création de s’exprimer", estime Frédéric Delcor - même si certains souhaitent qu’on simplifie le parcours du combattant que représente la tournée de ces différents "guichets".
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Alain Lorfèvre