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Jury Driver

Publié le 11 mai 2011 dans Actu ciné

Habitué aux grands rôles, Robert De Niro est le chauffeur du jury cannois. Logique, pour celui qui y était “Taxi Driver” il y a tout juste trente-cinq ans.
Imaginons la scène. Le 22 mai prochain, le jury du 64e Festival de Cannes se réunit. Autour de la table, Johnny To est bien décidé à ne pas laisser passer le moindre prix pour Takashi Miike. Le critique norvégien n’aimera pas avoir l’air partial si le voisin danois Von Trier fait son chemin dans le palmarès. Le réalisateur tchadien Mahamat Saleh Haroun, songeur, tire sur son cigare. Nansun Shi, la productrice chinoise, cherche son interprète, égaré sur la plage du Majestic la veille. Appliqué, Olivier Assayas révise ses notes sur "Hanezu", de Naomi Kawase, "Once Upon a Time in Anatolia", de Nuri Bilge Ceylan, et "Le Havre", d’Aki Kaurismaki. L’Argentine Martina Gusman verrait bien "La Peau que j’habite", de Pedro Almodóvar, comme Prix du Jury. Uma Thurman ressemble à une pub pour Givenchy. Les yeux dans son décolleté, Jude Law a la nostalgie du tournage de "Bienvenue à Gattaca". Le président du jury, Robert De Niro, qui, jusque-là, n’a pipé mot, se tourne soudain vers lui : "Hey, Jude, qu’as-tu pensé de ce film belge, avec l’actrice de Clint ?" Et le Britannique, sortant de sa rêverie, de répliquer, sourire en coin : "Are you talkin’to me ?"

Gageons qu’en dix jours de festival, il s’en trouvera bien un pour la lui faire, celle-là. Ce sera peut-être même cette effrontée de Jodie Foster, avec qui le protocole ne devrait pas manquer de lui faire monter les marches, trente-cinq ans, très précisément, après qu’ils les gravirent pour la présentation en compétition officielle de "Taxi Driver", de Martin Scorsese, qui décrocha la Palme d’or en cette année 1976.

Que de temps écoulé, que de films tournés (65) depuis que, à l’occasion de la sortie de ce film, De Niro déclarait, sans ambages, lors d’un entretien au magazine "Play-Boy" : "Il y a un type de film hollywoodien dans lequel je ne jouerai jamais." C’était avant "Mafia Blues" (1 et 2), "Meet the Parents" ("The Fockers" et "Little Fockers"), et on vous épargne le pire. A l’époque, âgé de 32 ans, l’ancien élève de Stella Adler est en passe devenir un mythe vivant, parce qu’il applique à la perfection son précepte de "défictionnaliser la fiction" - lui à qui l’on reproche parfois d’en faire trop a un jour livré ce commentaire sur son art : "On ne montre pas ses sentiments. On les dissimule." A ceux qui restent perplexes quant à la prédilection qu’il manifeste depuis vingt ans (déjà !) pour les comédies, lui qui a collectionné les gueules composées de criminel (Capone dans "Les Incorruptibles", 1987), de sociopathe (Max Cady dans "Les Nerfs à Vif", 1991), de monstre ("Frankenstein", 1994) et, même, de diable ("Angel Heart", 1987), à ceux-là, donc, rappelons que c’est dans ce registre qu’il fit ses débuts, chez son ami Brian De Palma ("Greetings", 1968, et sa suite, "Hi, Mom !", 1970). Dès 1982, d’ailleurs, il proposait à Martin Scorsese "La valse des pantins", une pantalonnade, autant hommage à Jerry Lewis que réflexion sur la quête effrénée de gloire médiatique qui paraît remarquablement prémonitoire désormais. Le film fut un four en son temps : il était trop tôt pour De Niro pour faire le clown.

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Alain Lorfèvre

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