Une journée d'Andreï Arsenevitch
Réalisateur:
Origine:
- France
Genre:
- Documentaire
Année de production: 1999
Durée: 0h55
Synopsis :
Une journée d'Andreï Arsenevitch, réalisé dans le cadre de la collection Cinéma, de notre temps de Janine Bazin et André S. Labarthe, est un hommage poignant à Andrei Tarkovski. 'Une journée d'Andreï Arsenevitch est, comme le laisse entendre le titre, emprunté à Soljenitsyne (Une journée d'Ivan Denissovitch), une journée de peine. C'est aussi une journée particulière où quelque chose survient qui bouscule l'ordinaire. Journée de peine comme toutes celles qui se succèdent depuis qu'après 'Le Sacrifice', Tarkovski se sait et se sent touché par le cancer. Journée particulière, puisque son fils, retenu par Moscou depuis le départ d'Andreï et Larissa, rejoint enfin ses parents en Suède. De cette double journée, une captation vidéo témoigne : Andreï Tarkovski est alité dans une chambre. Comme l'Aliocha du 'Miroir'. C'est un gisant. Un gisant moderne au lit duquel Chris. Marker convoie, comme pour les récapituler en une sorte de testament, les sept films que le cinéaste exilé a réalisés dans une vie trop courte. Plutôt qu'un documentaire, Marker signe, à travers le montage d'images aux statuts très divers {vidéo familiale, making- of, films, ...), une sorte de tombeau cinématographique pour Andreï Tarkovski. Un tombeau qui renferme non les images de sa vie, mais celles de ses films. Libre à nous de penser qu'elles sont le film condensé de la vie qui, dit- on, défile en accéléré dans l'esprit de celui qui agonise. On ne peut s'empêcher de penser au film 'Nick's movie' que Wim Wenders a consacré, il y a quelques années, aux derniers jours du cinéaste américain Nicholas Ray, lui aussi touché par le cancer. Les propos, la manière, la matière, tout distingue ces deux entreprises documentaires. Sauf une idée : cet art, à peine centenaire, qui est peut- être en train de s'éteindre, rend nécessaire la transmission directe, presque ritualisée, de réalisateur en réalisateur, d'une vraie ambition pour le cinéma. Ce tombeau pour Andreï en laisse ainsi deviner un autre, pour le cinéma cette fois- ci. Un tombeau qui ne serait pas mélancolique, mais initiatique. En effet, ce que le documentaire de Marker propose, c'est une sorte de leçon de cinéma. Qu'est- ce qu'une image ? Comment Tarkovski a- t- il affranchi le cinéma de la double tutelle de la littérature et de la peinture ? Quel rôle le cinéma joue- t- il dans la construction, l'enrichissement de la psyché humaine ? (...). La zone dans laquelle conduit le documentaire est si fertile en significations que l'on sent Marker défaillir. L'exégèse, même la plus inspirée, même la plus empathique comme c'est le cas dans le documentaire de Chris. Marker, ne peut tout éclairer. Tant de choses échappent. Et c'est tant mieux. Peut- être, et c'est la seule réserve que l'on fasse à ce documentaire, lui aurait- il fallu reconnaître l'incapacité à rendre compte de tout. Certaines des images entraperçues dans les films de Tarkovski nous travaillent encore après des années comme des blocs inentamables. Elles ont ajouté des images à nos images intimes, et s'en sont rendues solidaires. Elles ont creusé dans nos mémoires d'étranges dénivellations qui ne mènent nulle part, mais nous transportent et nous transforment. (Thierry Grillet / Les Inrockuptibles / 16.05.2000).
eljoud ould khalifa