Miel

Titre original: Bal
Origine:
  • Turquie
Genre:
  • Drame
Public: Tout public
Année de production: 2010
Date de sortie: 25/05/2011
Durée: 1h43
Synopsis : Yusuf a 6 ans, il vit avec ses parents dans un village isolé d’Anatolie. Pour le petit garçon, la forêt environnante est un lieu de mystère et d’aventure où il aime accompagner Yakup, son père apiculteur. Il le regarde avec admiration installer ses ruches et récolter le miel à la cime des arbres. Les abeilles se faisant de plus en plus rares, Yakup est obligé de partir travailler plus loin dans la forêt. Mais il tarde à revenir, et le monde se retrouve soudain plein de son absence.
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Publié le 6 juillet 2011
Bal/Miel est le dernier volet de la trilogie (d'inspiration semi-autobiographique) de Semih Kaplanoğlu sur le poète Yusuf entamée en 2007 (Yumurta/L'Oeuf) et poursuivie en 2008 (Sut/Lait). Narrée à rebours -Yumurta se consacrait à Yusuf à 40 ans revenant au pays après la mort de sa mère et Sul à l'adolescence et à l'éveil artistique du jeune garçon- Bal se penche donc sur l'enfance anatolienne de Yusuf dans une nature revêche en bordure de la Mer Noire, entre la forêt où son père apiculteur doit s'enfoncer toujours plus profondément pour chercher le précieux nectar du titre et une mère aimante curieusement tourmentée par son fils, mais bientôt soudée avec lui dans l'attente inquiète des longs voyages paternels. Opposition du monde de la mère (le foyer) et du père (la forêt), de la parole contre le chuchotement et le silence, des actions domestiques contre la fascination/méditation de la nature. Peu à peu, un réseau dense de symboles se crée et nous apparait opérer en secret comme le moteur narratif du film : signes féconds générés par les rêves en cascade de Yusuf dont les images inondent bientôt le récit et sa structure comme celui où il lève une ruche pour en sortir des poignées entières d'abeilles mortes jusqu'au contrechamp de l'imaginaire ouvert mais coupé par le générique du plan final. Outils étranges utilisés par le père auquel le fils revient comme la promesse d'un rituel toujours à venir. Leçon chuchotée du père dans la seconde séquence de ne jamais évoquer ses rêves à voix haute, écho à la mère, vers la fin, prenant son fils sur ses genoux pour lui raconter son rêve de la nuit dernière, tandis que Yusuf gêné, tente de se dégager. Lecture imposée en classe par le professeur et récompensée d'un titre honorifique malgré son bégaiement. Ainsi aussi, union des éléments fondateurs de ma trilogie : les œufs, le lait attachés à la figure maternelle et au motif de la fécondation, le troisième étant l'élément manquant d'un père manquant, spectre de sa disparition comme celle des abeilles. Si Kaplanoğlu, réalisateur de la « génération 60 » comme Ustaoğlu, Öztepek et Bilge Ceylan ne craint pas une certaine opacité d'interprétation, elle ne nuit pas au film du fait précis qu'elle s'accorde à la vision de Yusuf, pas encore poète, mais déjà un observateur attentif et émerveillé de l'univers autour de lui. Mais à mesure que le film avance et que le contrechamp de son regard hébété se décale et s'incline en séquences oniriques enchâssées, il apparait de plus en plus possible que Kaplanoğlu regarde non pas par les yeux ou avec Yusuf, mais à travers lui. C'est aussi en cela que Bal est le volet le plus accessible émotionellement d'une trilogie qui pèche ailleurs en excès d'auteurisme sans jamais s'éloigner de sa sincérité. La programmatique des titres permet de déceler ce qui chez Kaplanoğlu discoure vers une crainte de la disparition du monde rural vers les villes industrialisées, où les matières premières des titres de la trilogie deviennent des produits de consommation globale de supermarché, où l'effondrement d'un monde, à la fois riche et simple comme l'est celui de l'enfance de Yusuf, fait place à la éveil de l'âge adulte aux problématiques de la société, dépouillé d'une partie de ses signifiants mais augmenté d'une conscience, d'un discernement à partir duquel Yusuf pourra revenir à ses états antécédents (comme le film remonte le temps ?) pour les sublimer (par la poésie). C'est aussi ce qui permet au cinéaste d'insinuer en contrebande son style particulier défini comme du « réalisme spirituel » dont sa mise-en-scène, partie du concret du sol, s'élève peu à peu, à l'instar de l'image encadrant le film : celle d'une chute libre freinée à mi-parcours, antithèse du père qui monte au ciel dans le hors-champ pudique du troisième acte. Enfin, Bal permet une réflexion comparative sur les goûts des jurys de festivals, puisqu'il s'agit de l'Ours d'Or de Berlin 2010 et que nous avons sur nos écrans en ce moment même l'Ours d'Or 2011, Jodaeiye Nader Az Simin/Une Separation de Farhadi, preuve s'il en était besoin qu'une constance en terme de choix, souvent réclamée sur ce forum (« Tel ou tel film de X mérite/ne mérite pas la Palme/l'Ours/le Lion/etc.») est hors-propos et non envisageable car soumise à trop de variantes -dont la première est bien la qualité de la sélection, on semble l'oublier- que pour être rationalisée voire systématisée.
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