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Ari Folman revient à Cannes avec "Le Congrès"
Publié le 14 mai 2013 dans Actu ciné
Le réalisateur israélien fit sensation au Festival de Cannes en 2009 avec Valse avec Bachir, biographie documentaire animée. Le Congrès l'emmène vers l'univers de l'anticipation. Le film a été coproduit en Belgique par Entre Chien et Loup. Nous avions rencontré Ari Folman lors d'une de ses visites au Pôle Image de Liège, en 2012.
Comment est né Le Congrès ?
C'est l'adaptation d'un roman de Stanislas Lem, The Futurological Congress. J'ai écrit moi-même le scénario. J'ai adoré ce livre que j'ai lu quand j'avais 19 ans. Je ne me doutais pas à l'époque que je deviendrais réalisateur d'animation. Mais je me suis éloigné du livre. Dans le livre, c'est un journaliste qui tourne autour d'un conglomérat qui contrôle tout par le biais de la drogue. J'ai transposé cela avec une réflexion sur la réalité virtuelle.
Lire aussi : notre critique du Congrès
N'y a-t-il pas une forme d'ironie à voir un réalisateur de film d'animation écrire un film où il est question de la disparition des acteurs de chair et de sang ?
Je me vois d'abord comme un réalisateur. Et je suis nostalgique. J'adore les films à l'ancienne. C'est précisément le sujet du film : une réflexion sur la présence physique des acteurs. La sortie d'Avatar de James Cameron a coïncidé avec l'écriture du scénario. Cela m'a évidemment frappé. Je me souviens que le producteur de Cameron s'était plein que les avatars du film ne reçoivent pas de nomination à l'oscar.
Comment est arrivé Robin Wright sur le projet ?
Assez facilement. C'est une femme intelligente qui a tout de suite adoré le scénario. Nous avons eu un retour assez incroyable des acteurs aux Etats-Unis. Il y a quelque chose d'assez remarquable que j'ai découvert là-bas : c'est que si le projet est intéressant aux yeux des acteurs, l'argent n'est pas un problème. Dans la foulée de Robin, j'ai eu de la chance de voir débarquer des acteurs comme Harvey Keitel, Danny Huston ou Paul Giamatti. Ils aimaient le projet, ils voulaient y participer.
Le film mélange prises de vues réelles et animation...
Oui. Il y a en gros septante minutes en prises de vue réelles et cinquante en animation. Pour ces dernières, nous avons procédé à la rotoscopie des acteurs. C'est-à-dire que l'on redessine leurs mouvements et leur interprétation. Ce n'est pas comme la motion capture que Spielberg et Jackson ont utilisé dans Tintin. C'est plus proche de la vieille technique qu'utilisaient déjà les frères Fleischer dans la série Superman des années quarante . Pour les acteurs, c'était une nouveauté. Mais ils ont pris cela très au sérieux et ont mis un point d'honneur à ce que les prises fassent office de parfaites références pour les animateur. Mais quand ils sont arrivés sur le plateau de tournage, les acteurs ont été très surpris par les évolutions technologiques, car sur le plateau où nous avons tourné, ils ont toute la technologie de motion capture dernier cri. Je crois que les acteurs ont réalisé que tout ce dont il est question dans Le Congrès devenait d'une certaine manière réel.
Vous aviez fait Valse avec Bachir avec une toute petite équipe. Ici, vous changez d'échelle de production...
Sur Bachir, j'ai dû hypothéquer ma maison. Ici, je travaille avec une centaine de personnes entre cinq pays : Israël, Luxembourg, Belgique, Allemagne et Pologne. Nous avons tourné les parties avec les acteurs aux Etats-Unis. La production est basée en Israël. Il y a deux jours j'étais en Pologne, puis à Hambourg, aujourd'hui je suis à Liège, demain à Bruxelles... C'est éreintant, mais passionnant, car je peux partager des tas d'expériences, confronter des techniques de travail ou des approches artistiques différentes. Le tournage avec les acteurs était finalement la partie la plus simple. La création de la partie animée du film est un vrai défi. Quasiment chaque plan, chaque image doit faire l'objet d'un travail minutieux. Je me dis parfois que si j'avais tout fait en images réelles, le film serait déjà fini. Mais c'est aussi le sujet qui impose cette double réalité.
Entretien : Alain Lorfèvre