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Son nom est Weisz, Rachel Weisz

Publié le 6 septembre 2012 dans Actu ciné

Elle aime les auteurs et les blockbusters, les femmes de tempérament et d’action. Elle le prouve dans “The Bourne Legacy”. Rencontre avec la versatile actrice britannique.
Her name is Weisz, Rachel Weisz. Prononcez Weisz comme "vice" dans "Miami Vice". Talons noirs vertigineux, robe rouge parsemée de fleurs rouges et un blouson de star avec des étoiles partout, pas seulement sur les épaulettes (de général nord-coréen). Ce n’est pourtant pas à cela qu’on reconnaît une star, mais à l’air qu’elle déplace, au charisme. Dotée d’un sex-appeal de James Bond girl - c’est même la seule, la vraie, car elle vient de passer la bague au doigt de Daniel Craig -, elle ne la joue pas toisante mais accueillante. Rachel Weisz, c’est en quelque sorte la version brune de sa compatriote Kate Winslet. Elles ont d’ailleurs partagé, l’une après l’autre, la vie de Sam Mendes, le réalisateur du nouveau James Bond (comme quoi, si "The World in not enough", il est petit quand même).

Fille d’un inventeur (en matériel médical) hongrois et d’une psychanalyste autrichienne, cette Anglaise diplômée de Cambridge a contracté le virus dramatique à l’université. Bernardo Bertolucci l’a fait débuter au cinéma dans "Beauté volée" et, depuis une quinzaine d’années, elle va et vient du cinéma indépendant britannique de Winterbottom à David Leland jusqu’aux metteurs en scène prestigieux et audacieux : Aronofsky, Wong Kar-wai ("My Blueberry nights"), Fernando Meirelles ("The Constant Gardener" lui vaudra un Oscar). On la croise aussi dans des grosses productions de type hollywoodien comme "Stalingrad" ou "La Momie" et sur les planches du West End londonien où son interprétation de Blanche DuBois dans "Un tramway nommé désir" a été récompensée en 2010 par le Molière local, le Laurence Olivier Award.

2012 illustre idéalement son parcours versatile. D’un côté, on vient de la voir - sublime - dans "The Deep Blue Sea", un mélodrame de Terrence Davies. De l’autre, elle était à Deauville pour accompagner le lancement du nouveau "Jason Bourne" (de sortie mercredi prochain). Entre les deux, le festival de Venise projetait "To the wonder" de Terrence Malick où son rôle a disparu au montage. La mésaventure est arrivée à Sean Penn, Mickey Rourke, Gary Oldman, et d’autres. Raison pour laquelle Edward Norton, Leonardo DiCaprio ou Johnny Depp ont refusé les propositions du maître.

Mais the tea is ready, un peu de miel, et go !

Les cascades authentiques sont une des caractéristiques de “Jason Bourne”, ce doit être un challenge physique.
Je me sentais vraiment dans la peau d’une athlète. Il faut se concentrer et le faire. La scène de poursuite en moto était assez terrifiante mais pas vraiment athlétique finalement. Je devais m’accrocher à Jeremy Renner pendant qu’il conduisait, c’est lui qui était responsable de ma vie. Je crois que cette authenticité fait la qualité des cascades de "Bourne," cela se sent. C’était vraiment très intense, ce n’était pas un tournage très relaxant

Etiez-vous fan de la série “Jason Bourne” ?
Oui, j’ai beaucoup aimé les trois premiers et je suis surtout fan de Tony Gilroy. J’adore "Michael Clayton", un film exceptionnel à mes yeux.

Tony Gilroy a réinjecté du fond dans le film d’action. Ainsi vous incarnez une scientifique qui ferme les yeux sur les conséquences de ses recherches.
Oui, c’est un personnage moralement compromis. Elle est très excitée par ses expériences, elle a les moyens de les pousser et elle se refuse à voir où elles mènent. C’est une personne intelligente mais elle agit stupidement. Durant le film, au contact d’un de ses "cobayes", elle devient de plus en plus consciente, elle éprouve une certaine compassion pour ses "victimes". Mais elle se justifie en se disant qu’elle agit pour le bien de son pays, par patriotisme. Et quand la CIA débarque chez elle pour la "suicider", elle ne comprend absolument pas ce qui lui arrive.

Votre personnage dit “Je fais mon job” et refuse de voir au-delà. Dans votre métier, vous arrive-t-il de vous dire : “Je suis juste une actrice”. Pensez-vous que votre responsabilité puisse aller au-delà ?
En d’autres termes, est-ce que j’accepterais de jouer un personnage avec lequel je serais moralement en désaccord ? Il faut pouvoir distinguer la fiction de la réalité. La science, ce n’est pas de la fiction. Je pense que des histoires sombres, dérangeantes, qui mettent en scène un malaise, sont nécessaires. Les contes sont des histoires horribles mais cela ne rend pas les enfants autistes pour autant. Il y a les histoires d’un côté et la vraie vie de l’autre. Des histoires nous troublent, d’autres nous inspirent; elles sont là pour attiser nos émotions. Je pense que j’accepterais de jouer un personnage moralement répréhensible car les histoires nous parlent du monde, il y a des gens bien et d’autre beaucoup moins. Moi, je suis juste une actrice (rires).

Aller de “Deep Blue Sea” à “Bourne Legacy”, c’est aller d’un extrême à l’autre ?
Oui, on peut le dire. "Deep Blue Sea" est le portrait d’une femme dans le Londres de l’après-guerre. Ce n’est pas un film commercial, c’est le film d’un auteur, Terrence Davies, qui a une vision singulière. C’est le personnage qui mène le récit, alors que dans "Bourne" c’est l’intrigue. Ceci dit, Tony a réalisé des films très intimes aussi, ce sont les acteurs qui le préoccupent sur le plateau. Mais rien à voir avec Terrence qui ne tiendrait pas cinq minutes à regarder "Bourne". A mon avis, il ne doit pas regarder des films en couleurs, juste les "noir et blanc".

Comment avez-vous ressenti cette plongée dans le Londres des années 50 ?
Vous savez, il y avait tellement peu d’argent que ce Londres des fifties se résumait au simple décor du plateau. Les années 50, c’était plutôt un état d’esprit, une façon de s’habiller, de parler, d’être soumise. J’étais placée au centre du cadre et je devais rester immobile. Je ne suis pas très bonne à cela. C’est peut-être pour cela que j’ai fait "Jason Bourne", j’avais besoin de bouger. Mais cette façon de me contenir en permanence m’a permis, je crois, de ressentir cet étouffement qu’éprouvaient les femmes à cette époque. Terrence Davies est un réalisateur étonnant qui vit vraiment ses émotions, il peut se mettre en colère, pleurer, rire, s’enthousiasmer, parfois même il chante.

Il y a quelqu’un dans votre vie, on ne le citera pas, mais on aimerait connaître son avis sur vos aptitudes au film d’action.
Il l’a vu. Et il a été impressionné.
Vous êtes belge ? Les frères Dardenne sont belges, n’est-ce pas ? Je n’ai pas encore vu leur nouveau "Le Gamin au vélo". Est-ce qu’ils ont aimé travailler avec une actrice professionnelle ?

Oui. Et c’est sans doute le meilleur rôle de Cécile de France.
Je ferais n’importe quoi pour travailler avec eux. Pour moi, ce sont les plus grands metteurs en scène vivants. Je n’en connais pas de meilleurs. Leurs films sont d’authentiques contes moraux, si lumineux. Et tout le monde leur vole leur style. Ce plan séquence de la nuque dans "Le Fils", je ne sais pas combien de fois je l’ai vu par la suite. Je devrais les contacter, leur écrire une lettre...


Fernand Denis, envoyé spécial à Deauville

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