Pour les rares spectateurs ayant eu la possibilité de voir ce film, puisque daté de 1974, il ne fut réellement distribué que ...trente (Paris) et trente et un ans (Bruxelles) plus tard, et encore, dans quelques salles seulement, un curieux sentiment plane. Et ce n'est pas péjoratif, loin de là, tant Rozier propose un film à mille lieues de tous ses confrères réalisateurs, de l'époque ou non. Une forme de panache finalement, pour lequel collaborent notamment un Pierre Richard alors au faîte de sa gloire, et deux acteurs souvent confondus pour leur physique mais exceptionnellement réunis ici, le théâtral Maurice Risch et le regretté Jacques Villeret. Le résultat ? Une fiction à l'état quasiment brut, concoctée avec de très longs plans - à se demander où le monteur a-t-il lui-même fait naufrage...-, et énormément d'improvisation - mais n'est-ce-pas si rarissime au cinéma ?- visiblement très plaisante pour les acteurs qui s'en donnent à coeur joie, dans ces splendides paysages tropicaux. Tout profit pour le spectateur, évidemment, même si celui-ci cherchera en vain la ligne de conduite du film. Mais cet ensemble, que l'on pourrait quelque part qualifier d'...oeuvre d'art, compense largement certaines incohérences scénaristiques. Car l'étonnante authenticité de ces « naufragés » chamboule considérablement notre vision du cinéma et bouscule nos habitudes visuelles de façon inattendue, dérangeante même, mais elle laissera une trace indélébile à quiconque habitué des salles obscures. Et ce n'est pas peu dire...