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Du 1er juin au 31 août, la Cinematek propose un cycle consacré au film noir !

Publié le 25 mai 2016 dans Actu ciné

Le cycle se divisera en trois volets: un panorama du film noir, "Shades of noir" (adaptations et versions alternatives de classiques) et "Patricia Highsmith et le cinéma noir", à savoir des films adaptés ou inspirés de l'oeuvre de la romancière.
Film noir est un concept français. Pour traduire ce qui avait changé dans le cinéma américain après la Seconde Guerre en termes esthétiques, les critiques ont emprunté un terme générique propre au roman gothique britannique et à une série de traductions de polars américains des plus violents: noir.

Depuis 1946, beaucoup d'encre a coulé pour tenter de cerner ce que le terme "film noir" recouvre. Un genre, un style, un courant ? S'agit-il d'une période définie dans le temps ou le film noir apparaît-il à chaque époque ? Quelle est l'importance du noir et blanc, de l'éclairage en low-key, des effets de clair-obscur et des ombres ?

La première grande énumération et tentative de définition fut publiée en 1955 dans le livre Panorama du film noir américain (1941-1953) de Raymond Borde et Étienne Chaumeton. Les auteurs identifient six catégories de films avec, dans la première, 22 films noirs purs et durs, puis regroupent dans les autres des films dont les thèmes et les sensibilités s'en approchent, en les catégorisant sous des termes génériques tels que "psychologie criminelle", "films criminels en costumes", "gangsters", "documentaires policiers" et "tendances sociales". Ces catégorisations forment le point de départ de ce cycle.

Les auteurs proposent une définition très large : un film est noir par son atmosphère cauchemardesque, par sa cruauté ou son étrangeté, par ses ambivalences érotiques. Parfois cela dépend d'un seul personnage, d'un décor, d'une scène. Mais il en va principalement de l'effet émotionnel que le film dégage sur le spectateur : "le film noir est noir pour nous". Un certain nombre d'éléments récurrents permettent d'arriver à cet effet. Le meurtre et le crime font partie intégrante du film noir. Le milieu criminel est vu la plupart du temps de l'intérieur, avec une attention particulière pour la psychologie criminelle. Cela permet de distinguer les films noirs “authentiques” des police procedurals (documentaires policiers), qui font également appel aux décors réalistes, à la brutalité, aux poursuites et autres codes du film noir, mais en prenant systématiquement le point de vue de la loi. Dans le film noir, nous sommes entre criminels, qui peuvent révéler une personnalité complexe, névrosée, mégalomane, ou souffrant d'une fixation sur la figure maternelle. Les représentants de la loi montrent aussi régulièrement des signes de pathologies. Ils font preuve d'un penchant masochiste, sont égocentriques ou intéressés, ou entraînés malgré eux dans la spirale du crime. Tout comme les victimes, ils sont souvent considérés comme étant autant suspects que les criminels eux-mêmes.

La femme fatale remplace la classique gangster moll. Cherchant son propre profit, aussi coupable que victime, et chargée d'un érotisme qui n'est parfois rien de plus que l'érotisation de la violence. Violence qui n'est plus celle qu'on trouvait dans les films d'aventures. Le combat à armes égales est remplacé par le passage à tabac, le règlement de compte, l'exécution de sang froid, et le cadavre jeté aux ordures. Le meurtre n'est pas la conséquence de la haine, de la colère ou le résultat de longues années d'hostilité ; il est calculé, professionnel et omniprésent : le film noir - nous parlons du milieu des années 1950 - expose un large panel d'atrocités et de souffrances.

L'influence du surréalisme français est également mentionnée dans l'analyse de Borde et Chaumeton. L'atmosphère anxiogène du film noir naît principalement de l'ambiance irréelle qui le baigne et du déroulement improbable des événements. Un détective se fait engager pour une vague affaire, puis, quelques scènes plus tard, les cadavres commencent à s'entasser et le personnage principal est lui-même menacé, pris pour cible ou passé à tabac. Il y a quelque chose de quasi onirique dans cette brutalité incohérente, dans cette mise en rapport de mystérieux personnages aux intentions peu claires. Bref, il y a de la confusion dans le cœur onirique du film noir.

Tous les éléments mentionnés servent le même but : la désorientation du spectateur. Nous n'évoluons pas sur la trame rassurante d'une histoire logique, avec une distinction claire entre le Bien et le Mal, avec des personnages clairement définis et dont les intentions sont distinctement énoncées, avec des héroïnes sophistiquées et des héros qui font preuve de droiture. Dans le film noir, la place est laissée à de sympathiques tueurs à gages et de crapuleux représentants de l'ordre, à des criminels qui sont également pères de famille, à des victimes tout aussi suspectes que les malfaiteurs, des héroïnes cruelles et des héros injurieux. Le spectacle de l'aventure laisse la place à la cruauté et à la brutalité.
Les auteurs concluent : cette ambivalence, cette confusion, cette violence criminelle, produisent de l'angoisse et de l'insécurité chez le spectateur. Et la provocation du malaise est ce qui fait d'un film un film noir.

► Le programme complet est disponible sur le site de la Cinematek.


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