Actualités
Hirokazu Kore-eda, au nom du père
Publié le 18 décembre 2013 dans Actu ciné
A l'occasion de la sortie de Tel père, tel fils, Alain Lorfèvre a rencontré le réalisateur japonais Hirokazu Kore-eda pour parler de ce film autant inspiré de sa propre expérience de la paternité que du souvenir d’un père peu présent, mais au rôle pourtant déterminant.
A 51 ans et après neuf longs métrages, Hirokazu Kore-eda ne doit plus démontrer son statut de cinéaste majeur du Japon. Après Cannes, en mai, c’est au Festival de Gand que ce "jeune" père d’une fillette de six ans est venu présenter Tel père, tel fils.
Votre titre international et français est Tel père, tel fils. Est-ce la traduction littérale du titre en japonais, Soshite chichi ni naru ?
Non, il y a une nuance. Le titre japonais signifie "Etre un père après tout". Il insiste plus sur le personnage du père qui occupe le rôle central dans mon film.
Vous êtes devenu père vous-même il y a six ans. Ce n’est pas anodin.
Non, les questions que je me suis posées à l’époque m’ont donné envie de raconter cette histoire. Je voulais réaliser un film très concret sur la paternité. Mes films précédents étaient plus marqués par la figure de ma mère qui tomba malade durant un de mes tournages. Cette fois-ci, c’est l’expérience d’être père, le bouleversement que cela a engendré dans ma vie, qui m’a amené à écrire ce film. Je ne cherchais pas à livrer une thèse sur le sujet. Mais plutôt comme dans mes précédents films, à parler de l’intime.
Y a-t-il des exemples concrets, des souvenirs personnels qui sont présents dans ce film ?
Une scène en particulier vient d’une expérience réelle. J’ai un jour découvert une photo que ma fille a prise à mon insu, pendant que je dormais. Celle-ci m’a fait réaliser à quel point j’étais accaparé par mon travail et que les seuls moments que nous passions ensemble étaient pratiquement ceux où nous dormions. Ce fut un choc qui m’a incité à changer mon attitude. J’ai gardé cette idée dans le film.
Cela rejoint ce fait saillant de la société japonaise : le travail et la compagnie dont on est l’employé priment sur tout, même la famille.
C’est quelque chose qui change. Mon père a connu ça. Les sociétés poussent toujours leurs salariés à en faire plus et à se dévouer corps et âme. Mais depuis dix ans, est apparue une nouvelle tendance. Des pères de famille prennent plus de jours congé pour rester à la maison à cuisiner ou à s’occuper des enfants. Dans mon film, le père représente donc plutôt une approche un peu conservatrice du rapport au travail.
Ce film ne serait-il donc pas plutôt inspiré par votre expérience avec votre père ?
Oui, bien sûr. J’ai fait ce film aussi pour m’interroger sur ma propre enfance. Le fait que je sois moi-même devenu père m’a fait reconsidérer la place qu’avait tenue mon père. C’est devenu un miroir.
Que vous a appris votre père ?
Mon père était de cette génération de pères japonais qui étaient très peu présents à la maison. Nous n’avons pas eu une relation très intense. En réalité, je n’ai pas de souvenirs très marquants. Nous n’avons pas partagé beaucoup de moments intimes. Mais je dois le créditer d’une chose. Lorsque j’ai émis le désir de m’orienter professionnellement vers le cinéma, ma mère et ma sœur ont tout fait pour m’en dissuader, estimant que je devais trouver un métier plus stable. C’est mon père qui a défendu l’idée que je suive mon désir.
Pour le public japonais, voir Masaharu Fukuyama dans ce rôle de père doit être surprenant: c’est une pop star au Japon. Pourquoi lui avez-vous offert ce rôle ?
En réalité, c’est lui qui est venu me proposer que nous travaillons ensemble. Je me suis alors demandé quel rôle lui proposer. Dans sa carrière, comme beaucoup de chanteurs au Japon, il a déjà travaillé plusieurs fois au cinéma, mais en tenant des rôles historiques ou de héros d’aventure. Il n’avait jamais interprété celui d’un paisible père de famille. Je trouvais intéressant de le confronter à un rôle de composition de ce type. Le fait est aussi que l’avoir à l’affiche donne une plus grande visibilité au film. "Tel père, tel fils" est sorti au Japon sur trois fois plus de copies que mes films précédents. Cela me donne l’opportunité d’être découvert par un autre public.
Votre titre international et français est Tel père, tel fils. Est-ce la traduction littérale du titre en japonais, Soshite chichi ni naru ?
Non, il y a une nuance. Le titre japonais signifie "Etre un père après tout". Il insiste plus sur le personnage du père qui occupe le rôle central dans mon film.
Vous êtes devenu père vous-même il y a six ans. Ce n’est pas anodin.
Non, les questions que je me suis posées à l’époque m’ont donné envie de raconter cette histoire. Je voulais réaliser un film très concret sur la paternité. Mes films précédents étaient plus marqués par la figure de ma mère qui tomba malade durant un de mes tournages. Cette fois-ci, c’est l’expérience d’être père, le bouleversement que cela a engendré dans ma vie, qui m’a amené à écrire ce film. Je ne cherchais pas à livrer une thèse sur le sujet. Mais plutôt comme dans mes précédents films, à parler de l’intime.
Y a-t-il des exemples concrets, des souvenirs personnels qui sont présents dans ce film ?
Une scène en particulier vient d’une expérience réelle. J’ai un jour découvert une photo que ma fille a prise à mon insu, pendant que je dormais. Celle-ci m’a fait réaliser à quel point j’étais accaparé par mon travail et que les seuls moments que nous passions ensemble étaient pratiquement ceux où nous dormions. Ce fut un choc qui m’a incité à changer mon attitude. J’ai gardé cette idée dans le film.
Cela rejoint ce fait saillant de la société japonaise : le travail et la compagnie dont on est l’employé priment sur tout, même la famille.
C’est quelque chose qui change. Mon père a connu ça. Les sociétés poussent toujours leurs salariés à en faire plus et à se dévouer corps et âme. Mais depuis dix ans, est apparue une nouvelle tendance. Des pères de famille prennent plus de jours congé pour rester à la maison à cuisiner ou à s’occuper des enfants. Dans mon film, le père représente donc plutôt une approche un peu conservatrice du rapport au travail.
Ce film ne serait-il donc pas plutôt inspiré par votre expérience avec votre père ?
Oui, bien sûr. J’ai fait ce film aussi pour m’interroger sur ma propre enfance. Le fait que je sois moi-même devenu père m’a fait reconsidérer la place qu’avait tenue mon père. C’est devenu un miroir.
Que vous a appris votre père ?
Mon père était de cette génération de pères japonais qui étaient très peu présents à la maison. Nous n’avons pas eu une relation très intense. En réalité, je n’ai pas de souvenirs très marquants. Nous n’avons pas partagé beaucoup de moments intimes. Mais je dois le créditer d’une chose. Lorsque j’ai émis le désir de m’orienter professionnellement vers le cinéma, ma mère et ma sœur ont tout fait pour m’en dissuader, estimant que je devais trouver un métier plus stable. C’est mon père qui a défendu l’idée que je suive mon désir.
Pour le public japonais, voir Masaharu Fukuyama dans ce rôle de père doit être surprenant: c’est une pop star au Japon. Pourquoi lui avez-vous offert ce rôle ?
En réalité, c’est lui qui est venu me proposer que nous travaillons ensemble. Je me suis alors demandé quel rôle lui proposer. Dans sa carrière, comme beaucoup de chanteurs au Japon, il a déjà travaillé plusieurs fois au cinéma, mais en tenant des rôles historiques ou de héros d’aventure. Il n’avait jamais interprété celui d’un paisible père de famille. Je trouvais intéressant de le confronter à un rôle de composition de ce type. Le fait est aussi que l’avoir à l’affiche donne une plus grande visibilité au film. "Tel père, tel fils" est sorti au Japon sur trois fois plus de copies que mes films précédents. Cela me donne l’opportunité d’être découvert par un autre public.