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Vu à Cannes : "Grand Central" de Rebecca Zlotowski

Publié le 24 mai 2013 dans Actu ciné

Il est indéniable que Rebecca Zlotowski a trouvé un beau contexte pour le drame sentimental qu'elle conte dans Grand Central.

Voulant mêler à l'intime un propos social – et, même plus, de société, elle ancre son récit dans une caste de “galériens” (c'est l'un deux qui le dira) moderne : les ouvriers de maintenance des centrales nucléaires françaises.

Profession à risques, mais constituée de sans-grade, prolétaires risquant leur vie dans des lieux de haute technologie mais, surtout, à hauts risques. Leur obsession : la dose, “partout, toujours là” comme le dit le chef d'équipe joué par Olivier Gourmet – idéal, comme toujours, dans le rôle de la grande gueule chevronnée. Là, au cœur du réacteur, pas de place pour l'individualisme, encore moins pour l'imprécision. Du charbon à l'atome, la source d'énergie à beau être devenue affaire de technologie, ceux qui contribuent à la produire risquent toujours leur peau tous les jours : du coup de grisou à l'irradiation, l'épée de Damoclès est la même – jadis guettée par un canari, aujourd'hui par le dosimètre.

Pour nous faire rentrer avec simplicité dans cet univers, le candide de Rebecca Zlotowski est campé par Tahar Rahim. De son Gary, on ne sait pas grand chose, seulement qu'il n'a pas de diplôme, qu'il est en rupture familiale et traîne sans doute une ou deux casseroles. Rapidement intégré dans le petit cercle des contractuels qui entretiennent la centrale, il entame bientôt une relation avec Karole (Léa Seydoux), pourtant fiancée à Toni (Denis Menochet, idéal aussi en forçat moderne).

L'arrière-fond social est alors abandonné pour le plus classique triangle amoureux, auquel l'auteur apporte toutefois une inattendue variation. Zlotowski doit néanmoins sentir confusément que ce dernier ne la mènera guère loin, elle revient donc régulièrement à sa centrale où existe heureusement quelques beaux seconds rôles, parfois le temps d'une scène (la chef d'équipe, la collègue irradiéee). Mais, en matière de dose, la réalisatrice finit aussi par ne pas y aller de main morte, accumulant des péripéties qui finissent par la mettre en porte-à-faux par rapport à son parti pris de naturalisme initial.

Ses scènes au cœur de la centrale sont pourtant les plus réussies, celles où ses personnages trouvent leur force et leur crédibilité, même si Tahar Rahim et Léa Seydoux forment à l'extérieur un couple... irradiant. C'est d'ailleurs la sirène de la centrale, lancinante, qui sonnera le glas du fantasme de Gary – plus que les mots de Karole.

Réalisation et scénario : Rebecca Zlotowski. Avec Tahar Rahim, Léa Seydoux, Olivier Gourmet, Denis Ménochet,...

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