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Régis Roinsard : "Pour 'Populaire', Déborah a trouvé le film qui lui parlait; et moi, j’ai trouvé mon actrice"

Publié le 28 novembre 2012 dans Actu ciné

“Quand j’ai vu Déborah, j’ai tremblé, il s’est passé quelque chose. Son essai était hallucinant”
Populaire”, c’est une déclaration d’intention ?
Un titre à tiroirs, je dirais. C’est un mot très à la mode chez les jeunes, ça signifie être très connu. Pour d’autres, cela signifie, être proche du peuple. Quand on parle de cinéma populaire, on parle d’un cinéma plus large. C’est un pied de nez à ceux qui disent ce mot à mauvais escient ou qui s’en empare, comme des banques, des partis, des marques. Moi, j’avais envie qu’il soit neutre, rien avant et rien après. Je sais que cinéma populaire signifie aussi un cinéma qui prend les gens pour des imbéciles. Je voulais montrer que ce n’était pas obligatoire, qu’on pouvait offrir une histoire, de la réflexion, des sentiments, de la musique et des performances d’acteur.

En somme, offrir une comédie populaire avec du fond ?
C’est ce que je souhaitais. J’aime bien les années 50, c’est le début de beaucoup de choses, de l’entertainment, du sport spectacle, de la société de consommation, de l’émancipation féminine C’est une période charnière entre deux époques. Les gens aimaient aller vite, faire beaucoup de choses. Ils voulaient oublier aussi. Le film est gai, mais je n’étais pas fixé sur le ton, au départ. Il aurait été cocasse de faire un drame autour d’un concours de machines à écrire. Mais, naturellement, je ne suis pas porté vers la comédie.

Qu’est-ce vous a tellement intrigué dans ces compétitions de machines à écrire ?
Esthétiquement, je trouvais cela fou et sexy, toutes ces femmes derrière des petites tables. L’effort aussi. C’est un vrai sport. J’avais envie de parler de femmes, de sport, de filmer des choses graphiques, j’avais un sujet surprenant. Je me suis jeté sur mon ordinateur et le personnage de Rose est apparu tout de suite. Et puis, je suis parti à la recherche de documents. J’ai mis un temps fou à les trouver, mais quand cela arrivait, les gens avaient tout gardé. Et là, je pouvais me rendre compte de l’ampleur que ces concours pouvaient avoir. J’ai rencontré des championnes et des champions, car il y avait des hommes, aussi. Cela m’a nourri. J’ai ajouté le personnage de M. Louis. J’ai travaillé seul pendant quatre ans et puis avec deux autres coauteurs.

D’où vient l’idée du vernis à ongles de toutes les couleurs, si à la mode aujourd’hui ?
Parfois, on tombe bien et on n’y peut rien. C’est comme la mode des années 50. On n’y peut rien. Un film, c’est long à faire. En 2008, je ne pouvais pas prévoir que les années 50 seraient à la mode en 2012. Mais, elles reviennent toujours à la mode, car sa gamme chromatique touche les gens. Les vêtements, les voitures, l’architecture développent des formes qui sont devenues des maîtres étalon. C’est pur, sans extrémisme, c’est la ligne claire. Il y a une élégance propre à ces années-là.

Qu’est-il arrivé à Déborah François, on ne l’a jamais vue comme cela ?
Beaucoup de filles voulaient ce rôle. On a fait un casting très large casting, pour deux raisons. Primo : on ne voulait pas d’une jeune femme ultraconnue. Déborah est connue des cinéphiles, moins du grand public qui se souvient du "Premier jour du reste de ta vie", mais elle était une adolescente; maintenant, c’est une femme. Ce n’est plus la même image. Pour moi, la direction d’acteurs commençait là, à mettre les comédiennes en situation de concours. Celle qui allait le remporter était dans l’esprit, la volonté du personnage. Et dans le bureau du film, on avait collé des photos des actrices des années 50 et je voulais une comédienne qu’on puisse trouver à côté. Quand j’ai vu Déborah, j’ai tremblé, il s’est passé quelque chose. Son essai était hallucinant, supérieur à plein d’actrices confirmées. C’était le choix idéal. Elle est connue, mais pas trop, elle est hyperbelle, elle peut jouer une fille du village et devenir glamour. Elle est technique, elle donne beaucoup d’elle-même et elle est cash. Et puis, elle est un peu folle, aussi.

Mais, il y a plus cela, elle prend toute la lumière.
Déborah, c’est quelqu’un qu’on a envie de filmer. Et c’est notre alchimie à tous les deux. Elle a trouvé le film qui lui parlait; et moi, j’ai trouvé mon actrice. J’ai très envie de continuer à faire des films avec elle. Il y a un truc qui passe. Quand on aime une personne, on la filme le mieux possible. Déborah avait plein de choses à exprimer et elle trouve là, l’occasion de le faire pour la première fois.

La machine à écrire vous a-t-elle inspirée pour la mise en scène ?
Beaucoup. La machine a imposé un son et son rythme au film. Et puis, les machines des années 50 sont très belles, elles ont des châssis de voitures américaines. J’avais envie que le film soit beau comme une machine à écrire.


Fernand Denis



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