juliendemangeat

Accatone
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Publié le 4 octobre 2011
Avec Habemus papam Moretti retrouve le mordant de ses meilleures comédies. Il y fait preuve d’une grande liberté de ton, à l’image de son personnage qui déambule dans le Vatican en balançant toute sorte de remarques particulièrement cyniques. Si le film parait léger c’est pour mieux ridiculiser l’institution papale (et la psychanalyse au passage) sans avoir l’air d’y toucher. La façon de traiter les cardinaux comme des enfants apeurés lors du conclave restera une grande scène comique. Les scènes de psychanalyse sont également de beaux moments cocasses. L’autre partie du film, la crise existentielle du pape, est traitée avec la plus grande finesse par Moretti qui saisit parfaitement le désarroi d’un homme qui renonce. On y voit donc ce pape fuir ce qu’il ne veut pas être et se réfugier dans le théâtre, monde auquel il aurait voulu appartenir. Cette fuite révèle ce qui nous a tous traversé l’esprit un jour, dire non envers et contre tous. C’est fait ici avec grand fracas.

Publié le 4 octobre 2011
Apollonide commence par une vision idyllique des maisons closes. Dans ce lieux à l’abri du monde extérieur, on est hors du temps (il n’y a pas de notion de durée, on ne sait jamais quelle heure il est et tous les jours se ressemblent) et dans un espace indéfini ou seul le charme et la beauté ont leur place (l’espace filmé est essentiellement un décor de luxe qui n’a pas de réalité, on passe d’une pièce à l’autre sans se mouvoir). Par sa photo obscurcie et ses mouvements de caméra langoureux Bonello maintient de bout en bout une atmosphère sereine et délicieusement trompeuse. Car s’il s’applique surtout à capter la sensualité du lieu, cette vision fantasmée est progressivement contaminée par la réalité. Celle de la condition de ces prostituées qui sont en fait prisonnière de leur dette (cela n’est pas sans rappeler la condition de certains peuples d’Europe). Confinées dans cette cage dorée, elles n’ont aucune vie privée, et leurs moments de bonheur s’apparentent plutôt à des moments de consolation. Elles ne sont qu’un élément du décor, la partie vivante du fantasme du client qui le leur signifie : continuer d’être belle, vive et colorée… Du reste lorsque la faillite sera avérée, dans la plus grande indifférence des clients, elles seront revendues comme des marchandises. Lucides sur leur sort, elles ne rêvent secrètement que d’une chose : changer de monde en épousant l’un de ces hommes. Celles qui auront été trop près de ce rêve seront rappelées à l’ordre de façon cruelle. La grande habileté de Bonello est de nous livrer ces vérités progressivement, de façon laconique et sans militantisme aucun puisque nous sommes constamment dans le point de vu du rêveur éveillé qui contemple ce monde de luxure. Inexorablement, l’envers du décor prend le pas sur le devant. Le propos du film apparait de plus en plus clairement : derrière une vie sociale en apparence harmonieuse (ici la vie de salon) peut se cacher un rapport de domination parfaitement abject. Quant à la scène finale (sujet d’interprétations multiples), elle semble nous confirmer ce qu’est la réalité de ces femmes sans ce voile aussi élégant que trompeur. Elle nous dit simplement : ce que vous avez vu pendant 2 heures c’est ça, exactement ça.

Publié le 22 septembre 2011
Chef d’œuvre de mise en scène, « Tree of life » ne brille pas par ce qu’il dit mais par sa forme sublimée à chaque instant. Malick filme chaque plan avec une égale volonté de le transcender. Ainsi la trivialité d’une vie de famille sous la coupe d’un père brutal et autoritaire laisse constamment planer un monde parallèle paradisiaque que l’on retrouve finalement dans la scène idyllique de la plage. Prenant le risque de la solennité Malick s’en extirpe facilement tant il fait preuve de lyrisme pour illustrer ses intentions philosophiques. Le tout rythmé par un montage très alerte qui insuffle de la légèreté à un propos des plus ambitieux. Légèreté due aussi à la mobilité de la caméra qui avance toujours et nous donne constamment un pressentiment de ce qui va poindre à l'écran.

Publié le 6 septembre 2011
Comédie de mariage plutôt acide, mes meilleures amies négocie rapidement les poncifs du genre au profit d’une virulence face au conformisme de la réussite sociale. Par sa cruauté, cette comédie n’épargne pas son personnage principal qui n’en finit pas de toucher le fond. Ici incarné par la frondeuse Kristen Wiig qui joue la névrosée avec une obstination rappelant les comédies déjantées à la Seinfeld. Face à la perfection d’Hélène elle n’oppose qu’une aigreur puérile. C’est l’un des ressorts comiques récurrents du film et qui fait qu’on s’attache à ce personnage devenant soudain parfaitement immature (voir la scène de la bijouterie ou elle se livre à une joute verbale avec une ado). Grande habileté de l’écriture qui colle à son héroïne en la faisant réagir au quart de tour dès qu’elle est confrontée à une quelconque image de bonheur ou de réussite. Le casting caricatural est déjà un gag en soit. Le comique réside davantage dans les réactions des personnages, tous très différents, face aux situations (la panique générale lors de la scène débridée de l’essayage) que dans une construction narrative ou un mot d’auteur. D’où l’évidence du film qui se laisse plutôt guider par l’état émotionnel instable de son héroïne qui menace d’exploser à tout moment dans des scènes de basculement d’autant plus jouissives qu’elles adviennent naturellement.

Publié le 30 août 2011
La force de Super 8 est celle de ces enfants qui n’ont d’autres désirs que de rester ensemble pour vivre leurs propres aventures. Abrams excelle à raconter cette histoire de gamins des plus communes en apparence au milieu d’une intrigue fantastique, à la limite du pastiche, qui jamais n’aura de prise sur les motivations inébranlables de ce jeune groupe vibrant d’envie. La vision finale du super 8 tourné par ces apprentis cinéastes confirmera que cette histoire de monstre ne fera office que de décors, une simple opportunité de mise en scène. Ceci à la fois pour Abrams et pour le jeune réalisateur du super8 qui utilise naïvement le passage du train pour son film, scène qui préfigure l’intrusion de cette fiction pure dans leur petit monde. Au milieu de cette thèse éculée de science fiction, l’amour naissant de deux jeunes adolescents remporte aisément la mise et c’est ce que réussit brillement « Super8 » : renverser l’ordre d’importance des récits, la petite histoire écrasant la grande.

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