The Assassin

Titre original: Nie yin niang
Origine:
  • Taïwan
Genres:
  • Action
  • Drame
Public: Tout public
Année de production: 2015
Date de sortie: 24/02/2016
Durée: 2h00
Synopsis : Chine, IX siècle. Nie Yinniang revient dans sa famille après de longues années d’exil. Son éducation a été confiée à une nonne qui l’a initiée dans le plus grand secret aux arts martiaux. Véritable justicière, sa mission est d'éliminer les tyrans. A son retour, sa mère lui remet un morceau de jade, symbole du maintien de la paix entre la cour impériale et la province de Weibo, mais aussi de son mariage avorté avec son cousin Tian Ji’an. Fragilisé par les rebellions, l'Empereur a tenté de reprendre le contrôle en s'organisant en régions militaires, mais les gouverneurs essayent désormais de les soustraire à son autorité. Devenu gouverneur de la province de Weibo, Tian Ji'an décide de le défier ouvertement. Alors que Nie Yinniang a pour mission de tuer son cousin, elle lui révèle son identité en lui abandonnant le morceau jade. Elle va devoir choisir : sacrifier l'homme qu’elle aime ou rompre pour toujours avec "l'ordre des Assassins".

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Avis des internautesdu film The Assassin

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Publié le 25 mars 2016
D’une beauté saisissante le dernier HHH n’en n’est pas moins extrêmement volatile. Peut-être parce que ce formalisme gagnant, emportant tout sur son passage, n’arrive néanmoins pas à prendre le dessus sur cette intrigue inutilement compliquée. Si c’est un pari théorique de HHH de jouer sur l’abstraction des faits pour valoriser sa mise en scène c’est partiellement raté. Justement parce que cette narration toujours en décalage nous obsède et nous éloigne de l’image (on ne cesse de nous parler de ce qui se passe ailleurs ou avant). Comme si ce grand esthète ne faisait plus assez confiance à la force de ses propres images. Reste un film dont le formalisme assumé nous plonge dans cette indicible langueur propre aux films de HHH.

Publié le 7 juin 2015
Une temporalité de l'action comme incurvée, qui ploie vers l'en-dedans du plan pour y éclater en sourdine : Hou Hsiao Hsien, pour son retour au cinéma huit ans après « Le Voyage du Ballon Rouge » (2007), peu mémorable escapade en France et dix ans après « Three Times » (2005), a su ménager la surprise à l'annonce d'un « wu xia pian » (un film de sabre, de chevalier errant) situé sous la dynastie Tang, lui qui était plutôt rompu à la peinture des souvenirs d'enfance (tous ses films jusqu'à "Good Men Good Women") ou d'un Taipei et d'une jeunesse contemporaines ("Goodbye South, Goodbye", "Millennium Mambo",..). Chaque séquence est cette surprise décuplée par l'approche impressionniste et à l'Est de tout fondement dramaturgique de l'auteur de "Three Times". La composition des plans se tient à mi-chemin entre une savante réflexion sur l'art de l'époque, ses truchements de perspective notamment et une approche plus organique à partir des corps et du vide, chaque cadre étant construit autour d'un centre absent qui aimante (sinon érotise) les bords. Ce sont toutes les scènes de combat du film traitées sur la même modalité, mais sans cesse variée : introduites par la présentation dans un même plan large des deux forces en présence qui se jaugent, Hou raccorde soudain sur le cœur même de l'affront, un geste déjà fait, ou un corps qui glisse si vite que la caméra peine à le suivre : un destin toujours-déjà joué, comme le duel des deux femmes dans la prairie de bouleaux qui ne cesse de les voiler/dévoiler l'une à l'autre (notre culture occidentale nous évoque le tableau « Carte Blanche » de Magritte), soldée sur l'insert du masque fendu, ou l'attaque en forme d'adieu final de la nonne à Nie Yinniang. On se surprend à penser à Bresson : son "Lancelot du Lac", tout en jaillissements soudains de proxémie, de coupes abruptes qui ellipse le raidissement des muscles et l'attaque du geste meurtrier, est le voisin formel direct de "The Assassin". Les deux cinéastes aux cultures opposées se retrouvent sur un sens prégnant de la concrétude du monde, et de l'impermanence des êtres. Une scène commence par un panoramique sur une bougie qui se consume et dérive sur la tapisserie au mur : la co-présence des éléments, ici le feu et l'air qui fait vaciller la flamme, mouvement contre immobilité, sont des forces conjointement présentes dans chaque plan pour rappeler la distance imprimée face à l'apparat de la reconstitution (la distance hou-esque comme équivalent à la distance brechtienne) tout comme face à l'agitation d'une société de castes que la mort a toutes rendues égales. Hou ne parle-t-il pas d'ailleurs en souriant d'un film de sabre « avec de la pesanteur », ironisant sur le "Tigre et Dragon" d'Ang Lee. C'est, dans une dialectique voisine, l'alternance typique du genre (scènes d'affrontement / scène « de bivouac » comme dans le western) respectée par Hou qui lui permet de « mettre en spectacle », littéralement, sa conception du temps — et des temps : celui de l'attente, de l'observation en chien de faïence de l'ennemi, du calme avant l'attaque, du suspens au cœur du combat, de la dilatation du geste létal, de la parenthèse commentée de la danse, de l'aparté didactique, de l'observation des à-côtés de la scène. Les palais de province de la dynastie Tang ne sont jamais apparus aussi opulents que dans ce carcan formel en forme d'écrin à leur beauté, menacés par les coups de boutoirs des tambours de la cité. Un étalonnage audacieux permet d'ajouter aux extérieurs des tonalités jamais vues auparavant et d'outrer la lumière naturelle, saturant tout un champ de blé à tel point que le convoi qui le longe est plongé dans l'obscurité malgré le soleil de midi. Pour ravir à un cinéaste avec lequel il partage un sens inné du cinéma comme expérience d'hypostase et le goût pour l'univoque, Hou aurait pu baptiser son film du nom de celui de Weerasethakul présenté également en Sélection Officielle : le cimetière de la splendeur. Le prologue du film, trois séquences cinglantes en noir et blanc et au format 1,37:1 (« en couleurs, ce serait trop cruel » assure Hou) montre les trois postures du personnage et son auteur avec un art de l'économie qui est celle des grands maitres : l'attaque, l'esquive et la fausse servitude. La première offre une triple preuve de maestria, façon de rebrasser les cartes tout en rappelant que la maitrise n'est pas jamais une question de rétention mais de don et d'observation. Les branches d'arbres qui suivent le plan du meurtre posent le système de renvois à la Nature que le film ne cessera d'opérer (réponse en cela aux univers clos de "Fleurs de Shanghai" et "Three Times"). La deuxième, ingénieuse, est une mise en abime du geste Hou-esque à nouveau : non content de ne pas s'asservir aux conventions du genre, il va les défigurer en les intégrant à un système esthétique plus coercitif encore : le sien. Le geste de Nie qui balaie le sabre est juste et échappe à l'œil, comme la plupart des scènes de combat qui suivront seront illisibles du simple point de vue de l'action, trop rapides ou décentrées pour nous les « faire vivre de l'intérieur ». La troisième est une feinte, l'apparent usage des codes du genre ou l'obéissance bien illusoire de l'Assassine à sa maitresse, alors que plus maternelle que commanditaire d'un bain de sang elle tente de lui asséner en guise d'adieu des coups de fouet avant de la regarder s'éloigner une dernière fois. La majesté du film tient à cette grâce à exhiber, mieux encore que la rétention des plans-séquence et du huis-clos de "Fleurs de Shanghai" (1998), l'infinie variété de ressentis de ces instants et leur richesse sensorielle et plastique. Quel cinéaste, hormis Renoir, a donné à la durée et à la minute même de la prise un tel luxe de préciosité et d'attention, une dimension si charnelle ? Quel cinéaste, sinon Garrel, a conféré une telle religiosité au silence, à l'étude minutieuse d'un son direct, une telle spiritualité à la co-présence des corps dans un espace ? « Si ce film était un fleuve, ou plus exactement un torrent, je m’intéresserais au cours de ce torrent, à sa vitesse, à ses méandres, ses tourbillons, beaucoup plus qu’à sa source ou à son embouchure. » métaphorise Hou dans le dossier de presse. Le baroque en germe dans "Millennium Mambo" et ses longues focales systématiques et dans la reconstitution des "Fleurs de Shanghai" s'épanouit pleinement dans "The Assassin", avec ses avant-plans flous systématiques envahissants (nature en extérieurs, voiles et oripeaux en intérieurs) et un travail de sape de la forme, moins préoccupé par la cohérence et l'harmonie de ses soubassements que par le passé – la structure s'étant d'ailleurs cherchée durant un an de montage, un record pour celui qui a monté "Les Garçons de Fengkuei" en deux semaines. Au-delà de tout, "The Assassin" est un immense film textural, qui reprise sans cesse le motif du voile tiré et retiré comme acte de monstration et de dérobée au regard, et parfois simultanément (le titre original composé de trois mots qu'on peut traduire par : « La fille qui se cache et écoute »). Lors de la longue discussion de Tian Ji'an avec son épouse, un tissu translucide vient orner le cadre jusqu'à recouvrir partiellement la scène, comme un voile battu par une légère brise jusqu'à ce qu'un contrechamp lointain, dans le même mouvement circulaire lent, ne dévoile Nie Yinniang dans la pièce voisine, mais invisible lorsque les couches de voiles s'alignent. Jusqu'à la dernière séquence, où Nie revient parmi les siens, ce sont les toiles d'araignées luisant de reflets argentés à l'avant-plan qui strient le cadre et ce faux retour au calme. Le plan d'après, telle John Wayne dans "The Searchers", elle s'en retourne de nouveau sur les routes. Inflexible, à peine esquissée, solitaire et mutique, Shu Qi donne à cette silhouette de personnage un répertoire d'affects et une sensorialité presque obscènes s'ils n'étaient pas simplement l'objet des recherches de Hou, ce corps-roseau témoin du passage du temps, dans lequel s'incurvent toutes les passions.
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