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Michaël R. Roskam, ambassadeur du cinéma belge

Publié le 6 juin 2013 dans Actu ciné

Le réalisateur belge de Rundskop, qui prépare aux Etats-Unis son nouveau film Animal Rescue, a soutenu à Los Angeles la mission économique belge qui tente de séduire les producteurs et investisseurs américains. Nous l’avons rencontré.

Vous vous êtes investi dans cette mission belge. Pourquoi ?

Je pense qu’il est important de faire travailler deux nations ensemble. Et j’essaye de donner corps à cette vision. En tant que réalisateur international, j’ai tourné des films en Belgique et à présent je travaille aux Etats-Unis. Je développe aussi une série télévisée pour HBO. C’est une manière de montrer que nous pouvons travailler dans les deux directions. Nous ne devons pas toujours exporter nos talents. Nous voulons aussi montrer aux Américains qu’il est possible de faire des choses de qualité en Belgique. C’est le concept pour lequel je me bats. J’ai invité un certain nombre de mes contacts pour leur montrer ce que l’on pouvait faire en Belgique.



La Belgique, ce n’est pas très concret pour les Américains…?

Si, si. Dans les grandes métropoles comme New York et Los Angeles, il ne faut pas expliquer où Bruxelles se trouve. Dans le monde du cinéma dans lequel je travaille, la Belgique n’est pas une inconnue. Il ne faut plus leur expliquer si Bruxelles est la capitale ou le pays ! Il y a beaucoup de réalisateurs internationaux, comme Francis Ford Coppola, qui ont déjà travaillé avec la Belgique. Nous sommes mieux organisés aujourd’hui pour les accueillir. Pour nous, faire des films, cela fait partie de notre culture. C’est la question de l’accord commercial qui se trouve sur la table pour le moment entre l’Europe et les Etats-Unis. Cela a avoir avec la vision fondamentale de ce qu’est faire un film. Aux Etats-Unis, le film est un produit. C’est une très grosse industrie. En Europe, le film, c’est de l’art qui a néanmoins des aspects commerciaux car il faut produire les films. Cela suppose de l’argent, beaucoup d’argent. Mais finalement, nous sommes quand même face à une conception d’auteur. C’est pourquoi je pense que, malgré ces différences, il est important d’apprendre à se connaître. Ainsi, de ces rencontres naît la confiance et surtout on peut apprendre à dépasser les différences.



De quel côté vous situez-vous maintenant que vous faites des films aux Etats-Unis?

Je suis du côté européen. Je me définis comme un internationaliste. Je considère que l’exception culturelle est importante. Si nous voulons que nous, pays ou communauté, participions au patrimoine mondial, avec nos particularités spécifiques, il faut maintenir l’exception culturelle. Nous devons nous protéger contre certaines superproductions qui pourraient vouloir nous assimiler ou nous mettre sur le côté avec de mauvaises intentions. Leur modèle c’est de faire des films, de vendre des films, d’engranger des profits et à nouveau de refaire des films. Alors ils disent que l’exception culturelle constitue une concurrence déloyale. C’est leur argument. Nous, non. C’est malhonnête. L’argument que nous devons mettre sur la table est le suivant : étant donné que le public potentiel est beaucoup plus important aux Etats-Unis, les films y sont rentables plus rapidement. Nous devons maintenir un système qui garantit le maintien de nos spécificités. C’est important.



Certaines voix se sont élevées pour critiquer le fait que la Belgique ait accordé, lors de cette mission, une distinction belge au sénateur américain Christofer Dodd présenté par certains comme un opposant à l’exception culturelle ?

Je pense que l’on peut être critique mais une mission sert aussi à apprendre à se connaître. Les Américains doivent aussi bien comprendre pourquoi il est important de faire des films connectés à la réalité flamande, wallonne ou danoise. Ainsi, on peut construire une relation faite de respect mutuel et cela permet de mettre les différences sur la table. Cela permet de comprendre qui on est et d’où on vient. Nous sommes ouverts aux films américains. Ce n’est pas comme les Chinois qui ont des quotas très sévères. Moi, je défends le principe de l’exception culturelle portée par mes collègues européens. Sans cela, je n’aurais jamais pu tourner Rundskop. Ce serait trop facile de leur dire aujourd’hui, moi je fais des films aux Etats-Unis et… tirez votre plan. Dans ce sens, je trouve que la décoration remise au sénateur Dodd est stratégiquement intelligente mais sur le plan symbolique, ce n’est pas agréable pour tout le monde.


Entretien : Francis Van De Woestyne, à Los Angeles

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