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Deauville : Benth Zeitlin, un nom à retenir

Publié le 11 septembre 2012 dans Festivals

Coup d'oeil sur le palmarès du Festival du Cinéma américain de Deauville
Si, durant des décennies, le Festival du cinéma américain de Deauville a diffusé une image hollywoodienne des Etats-Unis, aujourd’hui, grâce à sa compétition centrée sur le cinéma indépendant, c’est une image hyperréaliste totalement niée par les studios qui est projetée sur l’écran. En l’occurrence, celle de l’Amérique des laissés-pour-compte, d’une Amérique pareille à un pays du tiers du monde. On se souviendra de "Winter’s Bone" où Debra Granik mettait en scène une adolescente, cousine de "Rosetta", vivant dans une cabane au fond du Missouri, s’occupant de sa mère malade, nourrissant ses petits frère et sœur, cherchant son père pour éviter la saisie.

Avec "Beasts of the Southern Wild", on est passé du quart monde à la jungle. La petite Hushpuppy vit dans un amoncellement de déchets formant un abri plus que précaire. Elle le partage avec des poulets, un cochon dans un "bassin" proche de La Nouvelle-Orléans. Ivre la moitié du temps, son père la traite durement, mais judicieusement, comme une survivante, comme une bête sauvage. Dans cette jungle aquatique, elle s’invente un monde où la préhistoire se mêle à sa réalité.

Cet uppercut cinématographique de Benth Zeitlin avait déjà mis KO le jury de la caméra d’or à Cannes, qui lui avait décerné son prix. Le jury de Sandrine Bonnaire en a fait autant à Deauville et celui de la Révélation Cartier de Frédéric Beigbeder aussi. Il s’en est fallu de peu que le jury de la presse internationale en fasse autant. Et si le public avait un prix, il l’aurait décerné au jeune cinéaste américain si on en croit l’ovation à l’issue de la projection. C’est dire l’impact de cette œuvre qui réinvente le néoréalisme au XXIe siècle avec Malick et les Dardenne. Sortie prévue le 12 décembre.

L’autre coup-de-poing fut primé par la critique internationale : c’est "The We and the I" de Michel Gondry. Son principe n’est pas sans évoquer "Entre les murs" de Laurent Cantet, mais cette fois, les murs sont mobiles et il n’y a plus de prof pour encadrer cette classe du Bronx qui rentre à la maison en bus à l’issue du dernier jour de classe. Le voyage est bruyant, irritant, saoulant mais incroyablement révélateur, livrant une image hyperréaliste de la jeunesse américaine urbaine des années 2010. Multipliant les idées, Michel Gondry immerge le spectateur dans leur langage, leur mentalité, leur éducation, leur rapport au monde et au téléphone portable. Très intelligemment, il nuance les portraits, du comportement en groupe (the We) à celui en petit comité (the I). On n’en reste pas moins médusé par le niveau de violence, d’agressivité dans les relations humaines. Et s’il fallait retenir un seul thème traversant les films de la compétition, c’est bien celui-là : la disparition de cette huile qui lubrifie les rapports humains. On ne parle plus, on hurle ; on ne dialogue plus, on insulte. Politesse, courtoisie, civilité, savoir-vivre, sociabilité : autant de mots obsolètes.


Fernand Denis

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