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Paul Giamatti à propos de Cosmopolis : "La violence est inévitable"

Publié le 30 mai 2012 dans Actu ciné

“Nous avons tous une attitude ambivalente, amour/haine, par rapport à ces individus dont la réussite nous fait sentir combien nous sommes minables.”
C’est en 2004-2005 qu’on découvre véritablement Paul Giamatti en trois films. "Américain Splendor" tout d’abord. Ou l’histoire de Harvey Pekar, authentique auteur de comics (qu’on voit d’ailleurs dans le film de Berman et Pulcini), mais qui est également incarné par Giamatti, modeste employé d’hôpital, dont la vie terne finit par lui inspirer une bande dessinée très ironique sur le réel, bien loin de la "Splendeur américaine". On peut dire qu’à partir de là, Paul Giamatti a pu capitaliser sur son physique, plutôt binoclard, un peu chauve. Bon, il n’est pas Tom Cruise (dont il est manager dans son prochain film où il incarne une rock star) ou Leonardo, mais on le remarque. Au point de décrocher une nomination à l’oscar en entraîneur de Russell Crowe, un boxeur en plein come-back dans "Cinderella Man", de Ron Howard. Mais soyons honnêtes, à côté de Russel, se tient Renée Zellweger plus insupportable que jamais, on regarde donc où on peut. Tant mieux pour Paul. Le rôle qui va impressionner à jamais les cinéphiles, c’est un petit film indépendant, "Sideways", qui allait révéler Alexander Payne (membre du jury de Moretti). Soit deux quadras en virée, une semaine dans la Napa Valley, un bellâtre soucieux de son meilleur profil et notre petit chauve au ventre rebondi. Ils ne sont jamais en phase. Quand l’un énumère tous les parfums d’un cru en jetant son nez dans le verre, l’autre boit la serveuse des yeux. D’où une virée un peu plus bouchonnée.

Après 15 ans de galère, ce diplômé en art dramatique de l’université de Yale voit enfin s’éloigner les petits rôles et s’allonger le nombre de ses répliques, pour devenir un second rôle très sollicité du cinéma américain.

Ainsi, dans "Cosmopolis", il n’apparaît qu’à 22 minutes de la fin avec un essuie sur la tête, mais il ne quittera plus l’écran.

"C’est une scène de 20 pages, très longue et très spéciale. Cronenberg avait prévu cinq jours de tournage, on a terminé en 2 jours et demi. David Cronenberg contrôle tout de façon incroyable. On ne répète pas, et pas un plan ne disparaît au montage. On a tourné exactement ce qu’on voit à l’écran. J’étais un peu angoissé, car c’est la dernière scène du film, et si elle est ratée, le film aussi. Je connaissais vaguement Robert Pattinson, je n’ai pas vu la série des "Twilight". Je ne savais même qu’il était Anglais, avec son accent, j’étais d’ailleurs persuadé qu’il était Américain. Je l’ai trouvé très bon, très bien préparé. Et comme le film a été tourné chronologiquement, il était en pleine possession de son personnage, et cela m’a aidé.

Dans le livre, mon personnage est beaucoup plus défini, on connaît son histoire. Je n’ai pas lu le livre, car David m’a demandé de ne pas le faire. Alors, j’ai dû me faire mon idée. Ce type est complètement délirant, mais honnêtement, je crois qu’il aime le golden boy. Il est obsédé par lui, comme nous sommes tous fascinés par ce genre de personnage, nous avons tous une attitude ambivalente par rapport à ces individus dont la réussite nous fait sentir combien nous sommes minables. Je ne savais pas non plus pourquoi je me baladais avec un essuie sur la tête, mais il fallait bien que je me trouve une raison précise. Je ne vous la dirai pas, car c’est au spectateur de l’imaginer. Cet homme, c’est personne, c’est un schmock, un loser. Lui-même se considère certainement comme une victime et comme celui qui ose se dresser contre le système. C’est ce que j’aime à propos du film, c’est qu’il parle tout autant de la désintégration du capitalisme que de la désintégration de la personne.

C’est un film politique, mais je ne me sens pas très concerné politiquement. D’ailleurs, cette scène pourrait se jouer sur un bateau de guerre, le contexte me concerne peu. J’aime jouer dans tous les types de films. Je vois d’ailleurs "Cosmopolis" comme une comédie noire, mais je partage ce que le film dit : la violence est inévitable."


Fernand Denis

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